M. Pokora face au défi d’Oradour-sur-Glane : une fiction TF1 qui divise avant sa diffusion

Alors que TF1 s’apprête à dévoiler l’une de ses fictions les plus ambitieuses de l’année, Oradour ne m’oublie pas, le choix de casting principal fait déjà grincer des dents. Et pour cause : c’est le chanteur M. Pokora qui a été choisi pour porter ce projet inspiré d’un événement tragique de l’Histoire française, le massacre d’Oradour-sur-Glane, survenu en juin 1944. Une décision artistique qui ne fait pas l’unanimité, comme en témoigne la critique virulente publiée par Libération, qui ne mâche pas ses mots à l’égard de l’interprète principal.

Une fiction historique au cœur de la Seconde Guerre mondiale

TF1 avait annoncé en grande pompe, mi-juin, le lancement de plusieurs projets historiques d’envergure, en partenariat avec Disney+ et Netflix. Parmi eux, Oradour ne m’oublie pas, qui ambitionne de retracer un pan particulièrement sombre de la Seconde Guerre mondiale : le massacre d’Oradour-sur-Glane, où 643 civils ont été tués par une division SS le 10 juin 1944. Pour ce projet à haute portée symbolique et émotionnelle, la Une a opté pour un traitement fictionnel mêlant mémoire historique et intrigue sentimentale.

Dans cette reconstitution, M. Pokora incarne un officier des Forces Françaises Libres, parachuté à proximité de la commune de la Haute-Vienne, en mission pour la Résistance. L’histoire prend une tournure plus personnelle lorsque son personnage retrouve son amour de jeunesse, une femme en fuite avec sa fille pour échapper à un mari violent. Ce triangle dramatique vient s’entrelacer avec la tragédie réelle d’Oradour, un mélange narratif qui n’est pas sans risque.

Une performance qui divise avant même la première

Le chanteur, déjà aperçu dans des fictions télévisées comme Le premier oublié en 2019, où il donnait la réplique à Muriel Robin, n’en est pas à sa première tentative d’acteur. Pourtant, son jeu ne semble pas avoir convaincu les premiers spectateurs de la presse. Libération, qui a eu accès en avant-première à la fiction, n’a pas mâché ses mots. “La télé française est capable de tout, c’est à ça qu’on la reconnaît. Même de produire une fiction historique sur Oradour-sur-Glane et de prendre M. Pokora en 1er rôle. L’affiche est un sketch à elle toute seule”, peut-on lire dans leur critique acerbe, relayée par le journaliste Nicolas Malaboeuf.

Cette déclaration résume bien le scepticisme ambiant autour du choix du chanteur pour un rôle aussi chargé de mémoire et d’émotion. Certains y voient un effet d’annonce, une volonté de TF1 de rajeunir son public et d’attirer des spectateurs qui ne s’intéresseraient peut-être pas à l’histoire autrement. Une stratégie marketing assumée, selon les propos du PDG de TF1, Rodolphe Belmer, dans Le Figaro : “Nous voulons toucher des foyers qui n’auraient peut-être pas vu nos contenus autrement.”

Une polémique révélatrice des attentes du public

Le casting de célébrités dans des fictions historiques n’est pas une nouveauté en soi. Mais dans un contexte aussi sensible que celui d’Oradour, cette démarche soulève une question centrale : peut-on tout mélanger au nom de la fiction ? À travers ce choix, TF1 semble prendre le pari de l’audace, quitte à heurter une partie de la critique et du public, encore très attachés à une forme de sacralité lorsqu’il s’agit de l’Histoire.

Pour certains, le personnage incarné par M. Pokora n’est pas seulement mal casté, il serait presque une faute de goût, voire une erreur de mémoire. D’autant plus que l’affiche promotionnelle du téléfilm a elle aussi été moquée, jugée trop “romancée” pour un sujet aussi grave. Une esthétique jugée inappropriée qui pourrait desservir le propos du film.

M. Pokora, entre musique, écrans et controverse

Déjà connu pour sa polyvalence, M. Pokora s’est essayé à de nombreux registres au fil des années : chanteur à succès, juré d’émissions, acteur de théâtre et désormais acteur de fiction historique. Pourtant, chaque incursion en dehors de la musique semble s’accompagner d’une levée de boucliers. Sa performance dans Le premier oublié avait déjà reçu un accueil mitigé, malgré des intentions louables.

Dans Oradour ne m’oublie pas, l’enjeu est encore plus élevé. Il ne s’agit plus simplement de démontrer ses capacités d’acteur, mais de porter un récit ancré dans une mémoire collective douloureuse. La pression est donc immense, d’autant plus que la fiction devra répondre à un double objectif : honorer les faits historiques tout en séduisant un public de prime time.

Verdict à suivre

Pour l’instant, le public devra patienter avant de se faire sa propre opinion. TF1 n’a pas encore annoncé de date précise de diffusion, mais le débat est déjà lancé. Entre ceux qui saluent l’effort de vulgarisation historique par la fiction et ceux qui dénoncent une forme de « peopleisation » de la mémoire, la fiction Oradour ne m’oublie pas cristallise des tensions bien au-delà de l’univers télévisuel.

Reste à savoir si M. Pokora saura faire taire ses détracteurs ou s’il deviendra, malgré lui, le symbole d’un glissement de la télévision vers une narration plus spectaculaire, au détriment de la rigueur historique. Quoi qu’il en soit, TF1 aura au moins réussi une chose : faire parler de son téléfilm avant même sa première diffusion.