Avant que Batman ne porte un masque, il y avait Zorro. En 1957, la série “Zorro” de Disney a fait irruption sur les écrans en noir et blanc, transformant Guy Williams en une icône immortelle de la cape et de l’épée. À ses côtés, l’un des méchants les plus mémorables de l’histoire de la télévision : le Capitaine Monastario au regard glacial, interprété par Britt Lomond, un véritable héros de guerre dans la vie réelle.

Près de 70 ans ont passé. Les épées ont été rengainées, les capes remisées. Que leur est-il arrivé ? L’un est devenu une légende en Europe. Un autre a tourné le dos à la célébrité pour peindre des fresques murales à Hollywood. Et plusieurs ont sombré dans un silence tragique. En 2025, leurs histoires sont plus dramatiques que n’importe quel duel à l’écran.

Guy Williams (Don Diego de la Vega / Zorro) – La mort solitaire d’une icône

Dans l’univers des masques noirs et des lames étincelantes, personne n’a porté la cape comme Guy Williams. En incarnant Don Diego de la Vega, Williams ne jouait pas seulement, il était le personnage. Avec un regard perçant, une posture élégante et une maîtrise de l’escrime, il a donné de la profondeur à la double identité : un Diego intellectuel et pacifique, et un Zorro héroïque.

Né Armando Joseph Catalano à New York, Williams était issu d’une modeste famille d’immigrants italiens. Avant Zorro, il fut soudeur pendant la Seconde Guerre mondiale et mannequin. Hollywood ne l’a pas immédiatement accueilli, mais lorsque Walt Disney l’a engagé, sa carrière a explosé.

Cependant, derrière la cape, les choses se sont compliquées. Alors que la popularité de Zorro était à son apogée, un conflit juridique entre Disney et ABC concernant les coûts de production a entraîné l’annulation brutale de la série en 1959. Williams, toujours sous contrat mais interdit de jouer Zorro ailleurs, s’est retrouvé piégé dans une cage dorée. Il était “catalogué”. “Quand je ne suis pas Zorro, je suis Diego. C’est comme jouer dans un film qui ne se termine jamais,” a-t-il admis un jour.

Il a trouvé son salut en Argentine. En 1973, il s’y installe, où les rediffusions de Zorro ont fait de lui une idole nationale. Il y mène une vie luxueuse et tranquille, apparaissant parfois en public sous les traits de Zorro, loin des caméras qu’il avait autrefois aimées.

Puis, la tragédie finale a frappé. En mai 1989, la police découvre son corps dans son appartement de Buenos Aires. Il était mort seul, plusieurs jours auparavant, d’une rupture d’anévrisme cérébral. Il avait 65 ans. Pas de funérailles grandioses, pas de frénésie médiatique. Juste le silence.

Britt Lomond (Capitaine Monastario) – Le méchant à l’écran, le héros dans la vie

Peu de méchants ont été aussi électrisants et exaspérants que le Capitaine Henrique Sanchez Monastario. Une vipère en uniforme, redoutable à l’épée et corrompu jusqu’à la moelle. Il était celui que les fans adoraient… détester.

Mais derrière cette moustache iconique et cette allure martiale se cachait Britt Lomond, un héros de guerre devenu acteur. Ce que peu de gens savaient en 1957, c’est que ce méchant était un authentique héros.

Né à Chicago, Lomond a servi comme parachutiste dans le Pacifique pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a été décoré de trois Purple Hearts, d’une Bronze Star et d’une Silver Star. Sous la cape du méchant se trouvait un homme qui avait connu la vraie guerre.

Après la guerre, il a failli se qualifier pour les Jeux Olympiques de 1952 en tant qu’escrimeur. Mais il a abandonné ce rêve pour devenir acteur. Initialement, il avait auditionné pour le rôle de Zorro, mais lorsque Guy Williams fut choisi, Disney vit en Lomond un potentiel encore plus grand : celui de l’adversaire parfait.

Monastario fut son rôle le plus marquant, mais il s’est lassé de toujours jouer les méchants. Lomond est passé derrière la caméra, bâtissant une seconde carrière en tant que réalisateur et directeur de production. Il était aussi un artiste, fondant un studio d’art et peignant des fresques. Britt Lomond est décédé en mars 2006 d’une insuffisance rénale, à l’âge de 80 ans.

Henry Calvin (Sergent Garcia) – Le sourire bienveillant et la fin tragique

Même après près de 70 ans, le rire inoubliable, la gaucherie attachante et la voix de baryton du Sergent Garcia résonnent encore. Né à Dallas, Texas, Henry Calvin était d’abord chanteur soliste dans une église avant de commencer sa carrière à New York.

Avec sa stature imposante (pesant plus de 150 kg) et sa voix puissante, il fut choisi pour incarner Demetrio Lopez Garcia. Garcia n’était pas seulement un ressort comique ; c’était une figure tragi-comique. Sa loyauté, sa naïveté et sa gourmandise le rendaient profondément attachant. Le chant de Calvin est également devenu une partie intégrante de la série.

Mais après l’arrêt de Zorro, la carrière de Calvin stagne. Aux yeux du public, il restait Garcia. La tragédie frappe lorsqu’on lui diagnostique un cancer de la gorge. Il décède seulement deux ans plus tard, en octobre 1975, à l’âge de 57 ans. Dans la vraie vie, Henry Calvin était un vétéran de guerre, une star de Broadway et un homme dont le cœur a profondément marqué l’âge d’or de la télévision.

Gene Sheldon (Bernardo) – Le cœur silencieux de Zorro

Si Guy Williams était l’âme de Zorro, alors Gene Sheldon, dans le rôle du fidèle et silencieux Bernardo, en était le cœur. Pour des millions de fans, Bernardo n’était pas seulement l’acolyte ; il était le génie discret, l’arme secrète.

Né dans l’Ohio, Sheldon a grandi dans le monde de la magie. Il a débuté sur scène comme assistant de son père magicien, souvent travesti et… ne disant pas un mot. C’était un présage.

Disney a modifié le personnage de Bernardo, le rendant seulement muet (au lieu de sourd et muet dans l’histoire originale) mais capable d’entendre secrètement. Ce choix en a fait les yeux et les oreilles de Zorro et a permis à Gene Sheldon de briller. Sheldon apportait à chaque scène l’habileté physique d’un clown et la précision d’une star du muet. Après l’annulation de Zorro, la carrière de Sheldon n’a plus jamais atteint les mêmes sommets. Il est décédé paisiblement en mai 1982 d’une crise cardiaque, à l’âge de 74 ans.

Les autres pièces du mythe

George J. Lewis (Don Alejandro de la Vega) : Le père strict, représentant l’âme morale du Pueblo. Lewis était un acteur mexico-américain né à Guadalajara, qui a eu une carrière remarquable de 60 ans, du cinéma muet à la télévision. Il a joué dans plus de 150 productions avant de mourir d’une attaque cérébrale en 1995, à deux jours de son 92e anniversaire.
Don Diamond (Caporal Reyes) : L’acteur polyvalent souvent sous-estimé, qui jouait l’acolyte simplet mais attachant de Garcia. Né à Brooklyn dans une famille d’immigrants juifs russes, Diamond a pourtant passé la majeure partie de sa carrière à jouer des rôles d’Espagnols, de Mexicains ou d’Amérindiens. Il parlait couramment l’espagnol, ce qui a défini sa carrière. Il est décédé paisiblement d’une insuffisance cardiaque en 2011, à l’âge de 90 ans.
Nestor Paiva (Teo Gonzalez) : L’aubergiste qui savait tout. C’était un acteur de caractère prolifique avec plus de 400 crédits. Son visage était familier du public pendant des décennies. Malheureusement, sa vie s’est terminée tragiquement en 1966, à l’âge de 61 ans, des suites d’un cancer de l’estomac.

Le temps a passé, mais l’héritage de Zorro reste intact. Du charme intrépide de Guy Williams à la menace sombre de Britt Lomond, ces acteurs ont inscrit leur nom dans l’histoire de la télévision. Aujourd’hui, leurs visages se sont peut-être estompés de l’écran, mais leur impact reste gravé dans le cœur des fans du monde entier.