Romy Schneider : ces photos bouleversantes des obsèques de son fils.

L’histoire du cinéma est jalonnée de tragédies personnelles, mais rares sont celles qui atteignent un degré de cruauté et de dévastation aussi absolu que celle vécue par Romy Schneider durant l’été 1981. Le 5 juillet de cette année-là, le destin, souvent cruel avec l’actrice autrichienne naturalisée française, lui a porté un coup fatal dont elle ne se remettra jamais : la mort de son fils, David Haubenstock, à l’âge de 14 ans. Un accident bête, foudroyant, qui a transformé la vie d’une icône en une descente aux enfers sans appel, exacerbée par une trahison médiatique d’une abjection sans précédent.

Le Coup de Foudre Froid de Juillet

Ce jour-là, David, le fils issu de son premier mariage avec Harry Meyen, se trouve à Saint-Germain-en-Laye, dans les Yvelines. Il séjourne chez son beau-père, Daniel Biasini, l’ex-mari de Romy Schneider. Adolescent plein de vie, à l’aube d’une existence prometteuse, David est une lumière dans la vie souvent tumultueuse de sa mère. Romy, malgré ses succès fulgurants à l’écran, a toujours été une âme tourmentée, cherchant l’équilibre dans un monde qui ne cessait de la malmener. David était son ancrage, son refuge, le lien le plus pur avec la réalité.

L’accident survient dans l’enceinte de la propriété. David, dans un geste de jeunesse ou de précipitation, tente d’escalader le mur d’enceinte pour rentrer chez lui. Un acte banal pour un adolescent, un raccourci innocent. Mais le destin est là, tapi dans l’ombre des vieilles pierres. En basculant, le jeune homme s’empale sur un pic de la grille, subissant une blessure interne fatale.

La nouvelle frappe Romy Schneider comme la foudre. Elle n’est pas sur place au moment du drame, mais l’onde de choc traverse les kilomètres et les frontières, la laissant anéantie. Le choc est d’autant plus violent que la mort de David n’est pas le fruit d’une longue maladie ou d’une tragédie annoncée, mais l’aboutissement absurde d’une simple maladresse, une faille dans le quotidien qui engloutit tout. Le journaliste et ami proche de l’actrice, Jacques Chancel, écrira plus tard l’impuissance et la fureur face à cette fatalité : une vie brisée, non par un événement historique, mais par une coïncidence tragique et dérisoire.

L’Affront Inouï de la Presse

Si la perte de son enfant est en soi un abîme de douleur, Romy Schneider va être confrontée à un degré de cruauté humaine et médiatique qui défie l’entendement et reste, encore aujourd’hui, une tache sombre dans l’histoire de la presse. Alors que la famille est plongée dans l’intimité sacrée du deuil, un scandale éclate : des photos du corps de David, ou des scènes entourant l’accident, se retrouvent publiées dans plusieurs journaux et magazines.

C’est un viol de l’âme publique. Le corps de son enfant est transformé en marchandise, en scoop macabre destiné à augmenter les tirages. Pour Romy, c’est une torture supplémentaire, une humiliation au moment où elle est la plus vulnérable. Le fait qu’une mère doive non seulement enterrer son enfant, mais aussi se battre contre la diffusion de clichés de son corps inanimé, révèle une abjection rarement égalée.

Cette invasion de l’espace sacré de la mort est la preuve que, même au faîte de la gloire, la vie privée des stars n’existe pas. Romy, qui avait déjà connu la pression médiatique, les jugements sur sa vie amoureuse et ses dépendances, découvre l’horreur ultime de la chasse aux images. Elle en est psychologiquement dévastée. Cette publication impitoyable ajoute une dimension de colère et de rage à sa douleur initiale, transformant son chagrin en une lutte contre la bassesse du monde.

Alain Delon : Le Chevalier de l’Ombre

Face à ce maelström de douleur et de cruauté médiatique, Romy Schneider n’est pas seule. Elle peut compter sur le soutien indéfectible de ses proches. Parmi eux, une figure emblématique du cinéma et de sa propre vie, Alain Delon. Leur histoire d’amour, passionnelle et déchirante, était entrée dans la légende. Bien qu’ils aient été séparés depuis des années et aient refait leurs vies respectives, le lien qui unissait Romy et Delon était d’une force indestructible, transcendant l’amour romantique pour atteindre une forme d’amitié fraternelle et d’entraide existentielle.

Aux obsèques de David, Alain Delon est présent, un roc dans la tempête. Son soutien n’est pas seulement symbolique, il est une présence physique, une barrière protectrice dressée entre Romy et le monde extérieur, y compris les objectifs avides des paparazzi qui n’hésitent pas à mitrailler la scène de deuil. Delon, lui-même figure médiatique souvent controversée, comprend mieux que quiconque la violence de cette exposition.

Des témoignages rapportent que c’est lui qui, dans une tentative de préserver la dignité de Romy et de David, a veillé à ce que les derniers instants de recueillement soient le moins perturbés possible. La photo de Delon, le visage fermé et grave, aux côtés d’une Romy brisée, est devenue l’image d’une loyauté absolue, le témoignage d’un amour qui, même éteint, reste le plus grand des soutiens. Delon, dans ce moment de faiblesse extrême de Romy, réaffirme son rôle de protecteur, d’ami de toujours, accomplissant le geste le plus poignant qui soit : être simplement là, silencieux et fort. Il se murmure même qu’il aurait, par la suite, tout fait pour racheter et faire disparaître les clichés les plus abominables du corps de David, en vain. Un geste qui en dit long sur l’urgence qu’il y avait à protéger la mère de cette ignominie.

L’Héritage d’une Tragédie

Les jours qui suivent l’enterrement sont un cauchemar éveillé. La perte de David marque un point de non-retour dans la vie de Romy Schneider. Elle ne s’en remettra jamais. Elle continuera à travailler, à incarner des rôles magnifiques, mais le sourire de la star est désormais teinté d’une mélancolie irréductible, d’une absence visible. Le deuil, dans sa version publique et scandaleuse, a épuisé ses dernières réserves de force.

Cette histoire est plus qu’une anecdote tragique sur une star. C’est un document accablant sur l’éthique médiatique des années 80, une époque où le sensationnalisme commençait à dévorer toute décence. L’affaire David Biasini est devenue un symbole de la façon dont la célébrité peut exposer un individu, même dans son chagrin le plus intime. Elle interroge la ligne rouge entre l’information et la violation, entre le fait divers et l’atteinte à la dignité humaine.

Romy Schneider, à travers ce drame, incarne l’image de la mère dévastée, obligée de porter son chagrin sous les projecteurs, mais elle est aussi l’icône de la résistance face à l’horreur. Sa vie, brutalement interrompue moins d’un an après la tragédie, est le testament d’une âme magnifique, mais trop fragile pour les coups que le destin et les hommes lui ont infligés. L’histoire de David n’est pas seulement l’histoire d’une mort ; c’est l’histoire de la solitude d’une star face à la cruauté, une leçon de journalisme macabre, et surtout, le souvenir poignant d’un amour maternel que rien, pas même la mort ou les tabloïds, n’a pu éteindre. Le vide laissé par l’adolescent dans cette propriété de Saint-Germain-en-Laye est resté le plus douloureux des spectres pour l’actrice, un fantôme qui a fini par emporter sa propre lumière.