Disparus de 1979 : Les photos dans la cave révèlent 27 ans de secrets, un amour plus fort que la mort et un sacrifice de la Seconde Guerre mondiale

Vụ mất tích của một cặp đôi vào năm 1979 đã được giải quyết nhờ những bức ảnh được tìm thấy trong hầm rượu vào năm 2006 - YouTube

En 2006, Antoine Garnier, un jeune ingénieur, acquiert une vieille maison à Chartres, rue Saint-Michel. La bâtisse est délabrée, figée dans le temps, mais il y voit un potentiel. Il ne sait pas qu’en décidant de rénover la cave humide et sombre, il s’apprête à déterrer un secret vieux de 27 ans, un drame humain d’une profondeur insoupçonnée qui hante encore les murs de la ville.

Derrière une pierre descellée, dans le recoin le plus sombre, Antoine découvre une enveloppe jaunie. À l’intérieur : 23 photographies et une note laconique. Les photos montrent un couple d’âge mûr, l’air résigné, posant dans divers lieux de Chartres. La note, tapée à la machine, dit simplement : “Ils sont en vie. Ils vont bien. Ne cherchez plus.” Mais le détail le plus glaçant se trouve au dos des clichés. Des dates, écrites à l’encre bleue, s’étalant d’octobre à novembre 1979.

Antoine l’ignore encore, mais les personnes sur ces photos, Henry et Marguerite Lavallée, les anciens propriétaires, ont été officiellement portés disparus le 22 octobre 1979. Ces images, prouvant leur présence à Chartres des semaines après leur évaporation, viennent de rouvrir l’un des plus grands mystères de la région.

Le dîner qui n’a jamais été mangé

Le lundi 22 octobre 1979, la vie de Henry et Marguerite Lavallée semble parfaitement ordinaire. Lui, 45 ans, est un professeur d’histoire respecté mais distant au lycée Marceau. Elle, 48 ans, est une bibliothécaire adorée, connue pour sa chaleur humaine. Sans enfant, le couple mène une existence routinière, presque terne, marquée par les visites dominicales chez leur nièce, Élise Fontaine.

Ce soir-là, quelque chose brise cette routine. Le lendemain, Henry ne se présente pas au lycée, un fait inédit en quinze ans. Le directeur, inquiet, envoie quelqu’un au domicile. La porte est fermée. Le voisin, Gérard Baumont, mécanicien veuf et ami du couple, ouvre la maison avec un double des clés.

La scène qu’ils découvrent est déconcertante. La maison est en ordre parfait. Mais dans la cuisine, la table est mise pour deux. Une soupe aux légumes refroidit sur la cuisinière. Le pain est dans la corbeille. Tout indique qu’Henry et Marguerite s’apprêtaient à dîner. Ils n’en ont jamais eu l’occasion.

Plus troublant encore : tout est là. Leurs papiers d’identité, leur argent, leurs vêtements, et même leur voiture, garée dans le garage. Ils se sont évaporés sans rien prendre.

L’inspecteur Claude Mercier, un vétéran de la police de Chartres, prend l’affaire en main. L’enquête est méticuleuse. On interroge les voisins, les collègues, la famille. Personne n’a rien vu, rien entendu. Pas de cris, pas de lutte. Le voisin Gérard, qui partage un mur mitoyen, n’a pas décelé le moindre bruit suspect. La nièce, Élise, confirme que leur déjeuner dominical la veille était d’une banalité absolue.

Mercier sent que quelque chose cloche. Il force le bureau de Henry, toujours fermé à clé. À l’intérieur, des notes de recherche obsessionnelles sur l’Occupation et la Résistance, et une boîte contenant de vieilles lettres en allemand datées de 1943. À l’époque, Mercier y voit l’excentricité d’un historien amateur. Il ne peut pas savoir qu’il tient là le cœur du secret. Faute de pistes, de corps, ou de mobile, l’enquête s’enlise. L’affaire Lavallée devient un “cold case”, un fantôme qui ronge ceux qui restent.

Les décennies de silence et de culpabilité

Pour Élise Fontaine, la disparition de sa tante et de son oncle est une plaie béante. Marguerite était pour elle une seconde mère. Pendant des années, Élise entretient la maison de la rue Saint-Michel, payant les factures, aérant les pièces, comme si elle attendait leur retour imminent. Mais le temps passe, la maison se dégrade, et le chagrin se transforme en un deuil impossible.

Gérard Baumont, le voisin serviable, sombre lui aussi. Il se mure dans le silence, rongé par une culpabilité que les autres attribuent à son impuissance. “Il disait qu’il aurait dû les protéger”, racontera Élise plus tard. Il meurt en 1995, emportant visiblement un lourd fardeau.

En 1993, Henry et Marguerite Lavallée sont officiellement déclarés décédés. Élise hérite de la maison, mais ne peut se résoudre à la vendre avant 2005. C’est ainsi qu’Antoine Garnier entre en scène, et que le passé, enfoui sous une simple pierre, refait surface.

L’enquête rouverte et la vérité inimaginable

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La découverte d’Antoine Garnier met le feu aux poudres. L’inspecteur Mathieu Renard, de la brigade criminelle, reprend le dossier. Il contacte l’inspecteur Mercier, désormais retraité. En voyant les photos, le vieil homme est stupéfait. “C’est impossible”, murmure-t-il. Ils reconnaissent les lieux. Ils reconnaissent le couple. L’une des photos, prise devant la gare, ressemble à de la surveillance.

Renard convoque Élise. En voyant les clichés de cet oncle et cette tante qu’elle pleure depuis 27 ans, elle s’effondre. “C’est bien eux”. Renard lui demande qui d’autre avait les clés de la maison. “Moi,” répond-elle, “et Gérard Baumont.”

La piste de Gérard devient centrale. Sa fille, contactée par la police, livre un détail crucial. Peu avant sa mort, son père, en pleurs et alcoolisé, lui a avoué avoir “fait une terrible erreur” et “aidé quelqu’un qu’il n’aurait pas dû”.

Mais pourquoi ? Quel secret poussait un couple sans histoire à tout quitter, aidé par leur voisin ? L’inspecteur Renard reprend les recherches là où Mercier s’était arrêté : le bureau de Henry. Il plonge dans les archives de la Seconde Guerre mondiale, obsédé par ces lettres allemandes et ces recherches sur l’Occupation.

Ce qu’il découvre est stupéfiant. L’identité “Henry Lavallée” est une construction. Le professeur d’histoire discret était né Carl Zimmerman, un soldat allemand stationné à Chartres pendant la guerre. Mais Zimmerman n’était pas un nazi ordinaire. Des archives de la Résistance prouvent qu’il était un agent double, un idéaliste qui détestait son propre camp. Il a sauvé des familles juives, falsifié des documents et aidé des résistants, dont un certain Jean Mercier (sans lien avec l’inspecteur), qui l’a protégé à la Libération et lui a fourni sa nouvelle identité.

Et Marguerite ? Elle était infirmière pendant la guerre. C’est elle qui a soigné Zimmerman après une blessure. Ils sont tombés amoureux, et elle a accepté de partager sa vie de secret.

Le sacrifice ultime pour protéger Élise

L’enquête révèle une couche encore plus profonde. Élise n’a jamais été leur nièce. Marguerite avait une sœur, Jeanne, morte en 1943. Les Lavallée avaient en fait adopté en 1948 une petite fille orpheline, Rachel Goldstein, dont les parents avaient été déportés à Auschwitz. Pour la protéger, ils lui ont donné le prénom de la sœur décédée de Marguerite, créant une fausse histoire familiale. Cette enfant, Rachel, n’est autre que la mère d’Élise, décédée dans un accident de voiture en 1965.

Élise est la petite-fille de victimes de l’Holocauste. Et en 1979, le passé qui avait rattrapé Henry l’a menacée.

En septembre 1979, un mois avant la disparition, un ancien officier de la Gestapo, Klaus Berger, arrive en France. C’est l’homme qui a ordonné l’arrestation des parents de Rachel. Des décennies plus tard, il cherche la seule survivante, Rachel (la mère d’Élise) ou ses descendants, pensant qu’ils pourraient savoir où la famille Goldstein avait caché des biens de valeur.

Henry, alias Carl Zimmerman, avec ses anciens contacts, apprend la nouvelle. Il comprend que Berger finira par retrouver Élise et ses enfants.

La décision est prise. Pour protéger Élise, pour détourner l’attention de Berger, Henry et Marguerite doivent disparaître. Ils doivent devenir la cible.

Le 22 octobre 1979, ils mettent en scène leur disparition. C’est leur ami, Gérard Baumont, qui les exfiltre par l’arrière de la maison. Pendant des semaines, il les cache dans un atelier à la campagne. C’est lui qui prend les 23 photos, ces “preuves de vie” destinées à être trouvées un jour, peut-être par Élise. C’est lui qui cache l’enveloppe dans la cave. Début novembre, il les aide à fuir en Belgique, où ils vivront sous de nouvelles identités.

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La culpabilité de Gérard n’était pas de n’avoir rien entendu ; c’était d’avoir menti à la police, à Élise, et au monde entier, pour tenir une promesse faite à ses amis.

Lorsque Renard révèle toute l’histoire à Élise, c’est un choc sismique. “Mes arrière-grands-parents sont morts dans les camps…” murmure-t-elle, en larmes, comprenant enfin le silence de ceux qui l’ont élevée.

Henry (Carl) est décédé en Belgique en 1992. Marguerite en 1999. Ils ont vécu une vie paisible, mais loin de celle qu’ils considéraient comme leur petite-fille. Ils ne sont jamais revenus, même après la mort de Berger en 1984. Le secret était trop lourd, le temps avait passé.

L’affaire est officiellement classée. Mais pour Élise, une dernière pièce du puzzle arrive par la poste : un colis de l’avocat belge de Marguerite. À l’intérieur, un album photo de leur vie en exil, et une dernière lettre.

“Ma chère Élise,” écrivait Marguerite, “je sais que tu ne liras jamais ces mots… Ton oncle Henry et moi t’avons aimé comme notre propre fille… Notre disparition était le dernier cadeau que nous pouvions te faire. Ta sécurité, ton bonheur… J’espère que tu as eu une belle vie. C’est tout ce que nous avons jamais voulu pour toi.”

Élise s’est rendue sur leur tombe, en Belgique. Elle a déposé des roses, comme celles que Marguerite cultivait à Chartres. Elle a enfin compris la nature de cet amour silencieux, un amour qui a exigé le sacrifice absolu : disparaître de la vie de ceux qu’ils aimaient le plus, pour qu’ils puissent vivre.