La Maîtresse demanda de nettoyer la cave— et Roselise y découvrit un secret enfoui depuis des années.

Le tonner grondait au-dessus des plantations de cannes à sucre de l’habitation Sainte-croix Palmiste, annonçant l’arrivée de la saison des pluies dans cette région reculée de la Guadeloupe, l’année 1847 s’écoulait lentement, rythmé par le labeur incessant des esclaves et les caprices de leur maîtres.

 C’est dans ce contexte que Roselise, une jeune femme de ans au très fin et au regard déterminé, se dirigeait vers la grande maison coloniale en réponse à la convocation de madame Françoise Laroche. L’air était lourd d’humidité et de tension. Roselyise avait grandi sur cette plantation, fille d’une cuisinière et d’un ouvrier agricole, tous deux décédés lors d’une épidémie de fièvre jaune quelques années auparavant.

 Depuis, elle travaillait comme domestique dans la grande maison, naviguant avec prudence entre les exigences de ses maîtres et sa soif secrète de liberté. Madame La Roche l’attendait dans le salon principal. C’est très aristocratiques, marqués par l’âge et les années passées sous le soleil tropical.

 Veuve depuis peu, elle dirigeait désormais seule l’habitation avec une autorité inflexible, crainte autant par les esclaves que respectée par les autres planteurs de la région. Roselise”, dit-elle d’une voix sèche, sans lever les yeux du registre qu’elle consultait, “J’ai une tâche particulière pour toi. La cave de la maison n’a pas été nettoyée depuis des mois. Je veux que tu t’en occupes immédiatement.

” La jeune femme inclina respectueusement la tête. “Oui, madame la roche. Dois-je m’y rendre maintenant ? Immédiatement et je veux que ce soit fait correctement. Chaque recoin, chaque étagère, cette cave contient des affaires importantes de feu. Mon époux !” Roselise acquissa.

 et se dirigea vers les escaliers, menant au sous-sol de la demeure. La cave était rarement utilisée, servant principalement de stockage pour les vieux meubles et les documents de la plantation. L’air était fraie et humide, contrastant avec la chaleur étouffante de l’extérieur. Armé d’un saut, de chiffon et d’une lanterne, elle commença son travail méthodiquement.

 Les toiles d’araignée pendèrent des poutres en bois et la poussière recouvrait tout d’un voile grisâtre. Au fur et à mesure qu’elle progressait, elle découvrait des objets oubliés, de vieux portraits de famille, des coffres en bois sculptés, des piles de documents jaunis par le temps.

 C’est en déplaçant une lourde armoire contre le mur du fond qu’elle remarqua quelque chose d’inhabituel. Le mur semblait présenter une légère dépression, comme si quelque chose était dissimulé derrière. Intriguée, elle approcha lerne et examina attentivement la surface.

 Ses doises explorèrent les pierres jusqu’à ce qu’elles sentent l’une d’elles bouger légèrement sous la pression. Soudain, un pan du mur pivota silencieusement, révélant une petite cachette. Le cœur de Roselise battait la Chamade tandis qu’elle dirigeait la lumière de sa lanterne dans l’ouverture. À l’intérieur, elle découvrit une boîte en métal et plusieurs documents soigneusement enroulés et protégés par de la toile cirée.

 Avec des mains tremblantes, elle sortit les objets de leur cachette. La boîte contenait des pièces d’or et des bijoux, mais ce qui attira vraiment son attention furent les documents. En les déroulant avec précaution, elle réalisa qu’il s’agissait de papiers d’affranchissement, des actes de libération d’esclaves, tous signés de la main de feu monsieur Laroche.

 Mais le plus troublant était une lettre, écrite de l’écriture élégante du défunt maître adressée à Monsieur Henry Montréal des Beauviliers, un planteur voisin réputé pour ses idées progressistes. La lettre parlait d’un réseau secret d’aide aux esclaves fugitifs d’un passage vers les îles britanniques où l’esclavage avait été aboli. Brosle sentit le monde basculer autour d’elle.

 Son ancien maître, qu’elle avait toujours considéré comme un homme dur mais juste, était en réalité impliqué dans un réseau clandestin d’émancipation. Cette découverte changeait tout ce qu’elle croyait savoir sur sa vie et sur les possibilités qui s’offraient à elle. Le bruit de pas au-dessus de sa tête la ramena brutalement à la réalité.

 Elle remit rapidement les documents dans leur cachette, referma le passage secret et reprit son nettoyage, l’esprit en ébullition. Cette découverte représentait peut-être l’opportunité qu’elle attendait depuis si longtemps, mais elle devait agir avec prudence. Un faux pas pourrait lui coûter la vie. Les jours suivants passèrent dans un brouillard d’incertitude pour Rosele.

 Elle accomplissait ses tâches quotidiennes avec un automatisme troublant, son esprit constamment préoccupé par sa découverte. Chaque regard de Mame Laroche lui semblait scrutateur. Chaque ordre donné paraissait chargé de sous-entendu. Avait-elle remarqué quelque chose ? Soupçonnait-elle que sa domestique avait découvert le secret de son défunt époux ? L’occasion de clarifier ses doutes se présenta lors du marché hebdomadaire de Pointe à Pitre.

 Madame Laro avait l’habitude d’envoyer Roselise acheter des provisions, accompagné de Tobias, un esclave de confiance chargé de porter les achats. C’était l’un des rares moments où la jeune femme pouvait s’éloigner de la plantation et observer le monde extérieur. Le marché grouillait d’activités. Marchand créole, esclave en commission, marins de passage et bourgeois locaux se mêlaient dans un balai coloré et bruyant.

 Roslie avait appris à reconnaître les visages familiers, à décoder les regards et les gestes qui constituaient le langage secret de ceux qui, comme elle, rêvèrent de liberté. C’est près de l’étal d’un marchand d’épice qu’elle aperçut Henry Montréal des Beauviliers, grand homme aux cheveux grisonnants et au regard intelligent, il était connu pour traiter ses esclaves avec une relative humanité, ce qui lui valait autant d’admiration que de méfiance de la part des autres planteurs.

 Rassemblant son courage, Roslie s’approcha discrètement de lui. “Monsieur des Beauviliers”, murmura-t-elle en feignant d’examiner des fruits. “Puis-je vous parler un instant ?” L’homme la regarda avec surprise, puis jeta un coup d’œil autour d’eux pour s’assurer qu’ils n’étèent pas observés. Que veux-tu jeune fille ? Je travaille à l’habitation Sainte-croix Palmiste.

 J’ai trouvé quelque chose qui vous concerne, quelque chose qui appartenait à feu Monsieur Laroche. Le visage de Monsieur des Beauviliers se durcit imperceptiblement. De quoi parles-tu exactement ? Rosalice prit une profonde inspiration. Des lettres, des papiers d’affranchissement, un réseau d’aide au fugitif. Le silence qui suivit sembla une éternité.

 Monsieur des Beauviliers acheta quelques mangues au marchand puis se dirigea lentement vers un coin plus discret du marché. Brosl le suivit, le cœur battant. “Si ce que tu dis est vrai !” dit-il finalement à voix basse. “tu joues avec ta vie et avec la mienne.” “Je le sais, monsieur, mais j’ai besoin de savoir.

 Mon maître était-il vraiment impliqué dans ce réseau ? Et si oui, ce réseau existe-t-il toujours ?” Monsieur des Beauviliers l’étudia longuement comme s’il jaugeait sa sincérité et sa détermination. Ton maître était un homme complexe. En public, il respectait les lois de la colonie. En privé, disons qu’il avait ses propres convictions sur la justice et la liberté.

 Et vous, monsieur, partagez-vous ces convictions. Un sourire fugace traversa le visage de l’homme. Jeune fille, tu me demandes de confesser des crimes passibles de mort. Pourquoi le ferais-je ? Parce que vous savez que ce qui se passe ici est injuste, parce que vous avez vu trop de familles séparées, trop de vie brisé et parce que vous savez que le changement viendra d’une manière ou d’une autre.

 Monsieur des Beauviliers resta silencieux un long moment, observant l’agitation du marché autour d’eux. Finalement, il se tourna vers elle. Il y a une chapelle abandonnée sur la route de Bassere à environ deux lieux de ta plantation. Si tu es vraiment déterminé à connaître la vérité, retrouve-moi là-bas demain soir après le coucher du soleil. Viens seul.

 Sans attendre de réponse, il s’éloigna se perdant dans la foule du marché. Broslee resta immobile quelques instants, réalisant pleinement qu’elle venait de franchir un point de non retour. Elle avait initié un processus qui pourrait la mener vers la liberté ou vers la mort. Le voyage de retour vers la plantation se déroula dans un silence pesant.

 Tobias, habitué à ses humeurs changeantes, n’osa pas l’interroger sur sa mine préoccupée. Roselise observait le paysage tropical défilé autour d’elle, consciente que chaque détail pourrait bientôt appartenir au passé. De retour à l’habitation, elle reprit ses activités habituelles, mais son esprit était déjà ailleurs, planifiant sa sortie nocturne du lendemain. Elle devrait être extrêmement prudente pour ne pas éveiller les soupçons.

 Les patrouilles nocturnes étaient fréquentes et tout esclave trouvé hors de la plantation sans autorisation risquait un châtiment sévère. Alors qu’elle préparait le dîner de Madame Laar Roche, cette dernière l’observa attentivement. Tu sembles distraite aujourd’hui, Rosel.

 Le marché s’est-il bien passé ? Oui, madame, j’ai trouvé tout ce qui était sur votre liste. Bien, j’espère que tu n’as pas traîné inutilement. Les temps sont troublés et je n’aime pas que mes domestiques s’attardent en ville. Rosele acquessa respectueusement, mais elle ne put s’empêcher de se demander si les paroles de sa maîtresse cachaient un avertissement plus profond.

 Madame Laroche savait-elle quelque chose sur les activités secrètes de son défunt époux ? Et si oui, jusqu’où était-elle prête à aller pour protéger ses secrets ? La nuit suivante, Roslie attendit que les dernières lumières de la grande maison s’éteignent avant de se glisser hors de sa case.

 La lune, à demi-caché par les nuages, dispensait juste assez de clarté pour lui permettre de naviguer entre les champs de canne à sucre sans utiliser de lanterne. Chaque bruissement de feuilles, chaque crine d’oiseau la faisait sursauter, mais sa détermination était plus forte que sa peur. Le chemin vers la chapelle était semé d’embûe.

Roselise devait éviter les sentiers principaux où les patrouilles nocturnes étaient susceptibles de passer. Elle connaissait bien le terrain ayant grandi sur ses terres. Mais l’obscurité transformait les paysages familiers en territoires menaçants.

 Les cannes à sucre se dressaient comme des sentinelles silencieuse, leurs feuilles murmurant des secrets dans le vent tiède de la nuit tropicale. À mi-chemin, elle entendit des voix au loin et se figea. Un groupe d’hommes approchaient leur lanternes balançant des cercles de lumière jaune dans l’obscurité. Roselee se jeta dans un fossé, bordant le chemin, retenant sa respiration tandis que les hommes passaient près d’elle.

Elle reconnut la voix du commandeur de la plantation qui donnait des ordres à ses subordonnées concernant la surveillance nocturne. Son cœur battait si fort qu’elle craignait qu’il ne l’entende. Une fois le danger passé, elle reprit sa route. Mais l’incident lui avait rappelé la gravité de sa situation.

 Si elle était découverte, les conséquences seraient terribles. Les esclaves fugitifs étaient souvent marqués au fer rouge, fouetté publiquement ou pire encore. Mais l’espoir de liberté était plus fort que la peur et elle continua d’avancer vers son destin.

 La chapelle abandonnée se dressait au sommet d’une petite colline, ces murs de pierres blanchis par les intempéries et le temps construite par les premiers colons, elle avait été délaissée lorsque la paroisse principale avait été établie plus près du bourg. Les lianes tropicales avaient envahi une partie de la structure donnant au lieu un aspect mystérieux et oublié.

 Roseles l’athignit essoufflé, le cœur battant autant de l’effort physique que de l’appréhension. Monsieur des Beauviliers était déjà là, assis sur un banc de pierre près de l’hôtel. À la lueur d’une petite lanterne, son visage paraissait grave et pensif. Il portait des vêtements simples, très différents de ses habits habituels de planteur, comme s’il avait voulu passer inaperçu.

 Il leva les yeux à son arrivée et lui fit signe de s’approcher. Tu es venu. Je n’étais pas certain que tu en aurais le courage. J’ai besoin de savoir la vérité, monsieur. Ma vie entière dépend peut-être de cette conversation. Il hocha lentement la tête, étudiant son visage à la lueur vacillante de la lanterne. Très bien, mais avant tout, je dois être sûr de tes intentions.

 Que comptes-tu faire de ces informations ? Roselee s’assit en face de lui, cherchant ses mots. L’air était chargé d’humidité et du parfum entêtant des fleurs tropicales qui poussaient autour de la chapelle. Je veux être libre, monsieur, pas seulement pour moi, mais pour tous ceux qui souffrent comme moi.

 Si ce réseau existe toujours, je veux en faire partie. La liberté a un prix. Jeune fille, es-tu prête à risquer ta vie, à quitter tout ce que tu connais, à ne jamais revoir cette île, à abandonner ceux que tu aimes ? Oui, répondit-elle sans hésitation, bien que sa voix tremble légèrement. Tout plutôt que de continuer à vivre dans ses chaînes.

 Et peut-être qu’un jour je pourrais revenir aider les autres. Monsieur des Beauviliers l’étudia longuement, puis sembla prendre une décision. Il sortit de sa poche un petit carnet de cuir usé et l’ouvrit délicatement. Ton ancien maître était effectivement l’un des nôtres.

 Nous formions un petit groupe de planteurs et de bourgeois qui croyant que l’esclavage était une abomination. Nous aidions discrètement les esclaves à s’échapper vers les îles britanniques ou vers les territoires libres d’Amérique du Sud. Il lui montra quelques pages du carnet couvertes de noms et de dates. Regarde, en trois ans, nous avons aidé plus de c personnes à retrouver leur liberté.

 Ton maître finançait les passages, fournissait de faux papiers, corrompait les autorités portuaires. Et maintenant, le réseau existe-t-il toujours ? Partiellement ? La mort de la roche nous a beaucoup affaibli. Il était notre principal financier et notre contact avec les capitaines de navire. Mais nous avons encore quelques alliés, quelques moyens d’action.

 Un médecin de Pointe àapitre, un marchand de Fort de France, quelques capitaines de navires marchands qui partagent nos convictions. Roslie sentit l’espoir renaître en elle. Que puis-je faire pour vous aider ? D’abord récupérer les documents que tu as trouvé. Ils contiennent des noms, des contacts, des informations cruciales pour notre réseau.

 Ensuite, nous devrons évaluer ta situation. Madame Laar Roche te fait-elle confiance ? As-tu accès à d’autres parties de la maison ? Elle me fait confiance, je crois. Je travaille pour elle depuis plusieurs années sans incident. Et oui, j’ai accès à presque toute la maison. Je connais ses habitudes, ses horaires, ses faiblesses. Parfait.

 Nous pourrions avoir besoin de ton aide pour contacter d’autres esclaves de la plantation pour organiser des évasions. Mais attention, madame la roche n’est pas aussi naïve que tu pourrais le croire. Elle soupçonne peut-être déjà que son mari avait des activités secrètes. Comme pour confirmer ses paroles, le bruit de sabot de chevaux raisonna dans la nuit.

 Monsieur des Beauviliers éteignit immédiatement sa lanterne et fit signe à Rosel de se cacher derrière l’hôtel. Ils retrentent leur souffle tandis que les cavaliers approchèrent de la chapelle. Le clair de lune filtrait à travers les ouvertures de la toiture, partiellement effondré, créant des jeux d’ombres inquiétants.

Fouiller partout ! Ordonna une voix qu’ils reconnurent tous deux. C’était le commandeur de l’habitation Sainte-Croix Palmiste, accompagné de plusieurs hommes armés. Madame Laroche a remarqué l’absence de sa domestique. Si elle est ici, nous la trouverons. Le cœur de Rosel se serra.

 Sa maîtresse l’avait donc surveillé plus étroitement qu’elle ne l’avait cru. Les pas lourds des hommes raisonnèrent dans la chapelle. tandis qu’il fouillait chaque recoin. Caché derrière l’hôtel de pierre, elles pouvaient entendre leur respiration, sentir leur présence toute proche. L’un d’eux passa si près qu’elle aurait pu toucher ses bottes.

 Il n’y a personne ici, dit finalement l’un des hommes après de longues de recherche. Peut-être qu’elle est allée ailleurs ou peut-être qu’elle est déjà revenue à la plantation. Continuons les recherches. Madame la Roche veut qu’on la retrouve avant l’aube. Elle dit que cette esclave cache quelque chose d’important.

 Les pas s’éloignèrent progressivement, mais Monsieur des Beauviliers et Roselise attendirent encore de longues minutes avant d’oser bouger. Quand ils furent certain d’être seul, il ralluma sa lanterne et se tourna vers elle, son visage marqué par l’inquiétude. “Tu vois, le danger est réel et immédiat. Madame Laroche te soupçonne déjà. Nous devons accélérer nos plans.

 Que proposez-vous ? Retourne à la plantation. Ag de rien n’était. récupère les documents dès que possible et cache-les ailleurs, quelque part où elle ne pensera jamais à chercher. Dans trois jours, il y aura un navire marchand dans le port de Pointe à Pitre. Le capitaine est un de nos alliés. Si tout se passe bien, tu pourrais être à bord.

 Roselise sentit un mélange d’excitation et de terreur l’envahir. 3 jours. Dans 3 jours, elle pourrait être libre ou morte. Et les autres esclaves de la plantation, nous ne pouvons pas tous les abandonner. Une chose à la fois, sauve-toi d’abord. Puis nous verrons comment aider les autres. Mais souviens-toi, si tu es prise, nous ne pourrons rien faire pour toi.

 Tu devras nier toute connaissance de notre réseau, même sous la torture. Il lui donna une petite bourse contenant quelques pièces pour le voyage et ceci. Il lui tendit un petit médaillon. C’est le signe de reconnaissance. Montre-le au capitaine du navire, il saura que tu es des nôtres. Ils se séparèrent dans la nuit, chacun prenant une route différente.

Roseles regagna la plantation. par un chemin détourné, évitant soigneusement les zones où les patrouilles étaient susceptibles de passer. Le voyage de retour lui sembla interminable. Chaque ombre pouvant cacher un danger, chaque bruit pouvant annoncer sa capture.

 Quand elle atteignit sa case, elle découvrit que sa porte avait été forcée et que ses maigres affaires avaient été fouillées. Ses quelques vêtements étaient éparpillés sur le sol, sa paillasse avait été retournée, même ses maigres provisions avaient été inspectées. Le message était clair. Madame la Roche ne lui faisait plus confiance. Elle s’allongea sur sa paillasse, feignant de dormir.

 Mais son esprit était en ébullition. Madame Laro savait. La question était de savoir jusqu’où allaient ces soupçons et combien de temps Roselise avait avant que la vérité n’éclate. Au grand jour. Dehors, elle entendait les patrouilles qui continuaient leur ronde, leur voix portée par le vent nocturne. L’aube se levait à peine quand Madame Laroche fit appeler Roselise dans son bureau.

 La jeune femme s’y rendit avec une apparente tranquillité, mais son cœur battait la chamade. Elle avait à peine dormi, passant la nuit à élaborer des stratégies. à prévoir des réponses aux questions qu’il attendait. Sa maîtresse était assise derrière son imposant bureau d’acajou, un registre ouvert devant elle et plusieurs papiers éparpillés sur le cuir usé du meuble.

 Le bureau était une pièce imposante au mur couvert de portraits de famille et de cartes de la région. Une grande fenêtre donnait sur les champs de canne à sucre où les esclaves commençaient déjà leur journée de laabeur. L’air était lourd de l’odeur du café fraîchement moulu et de l’en madame la roche brûlait parfois pour masquer l’humidité tropicale.

“Asied-toi, Roselise”, dit-elle d’une voix étonnamment calme. “Nous devons avoir une conversation importante.” Roseles prit place sur la chaise en face du bureau, gardant les mains jointes sur ses genoux pour dissimuler leur tremblement. Elle remarqua que madame la roche avait les traits tirés comme si elle aussi avait passé une nuit blanche.

Ses cheveux grisonnants étaient moins soigneusement arrangé que d’habitude et ses yeux portaient les marques de la fatigue et de l’inquiétude. Tu travailles pour moi depuis 5 ans maintenant. Tu as toujours été une domestique fiable, discrète. C’est pourquoi ce qui s’est passé hier soir me déçoit profondément.

 Je ne comprends pas, madame. Madame la roche se leva et se dirigea vers une armoire d’où elle sortit un petit coffret de bois. Elle l’ouvrit et en retira plusieurs objets. Un mouchoir déchiré, quelques brins d’herbe, une petite pierre. Mes hommes ont trouvé ceci sur le chemin de la chapelle abandonnée. Ce mouchoir, je le reconnais.

 C’est celui que je t’ai donné l’année dernière pour tes bons services. Roselise sentit son estomac se nouer. Elle avait perdu son mouchoir durant sa fuite précipitée de la veille. Ne me mens pas, Rosel. Mes hommes t’ont cherché toute la nuit. Tu n’étais pas dans ta case. Tu n’étais nulle part sur la plantation.

 Où étais-tu ? Rose avait préparé sa réponse, mais face à cette preuve matérielle, elle sentait sa confiance s’effriter. J’avais des crampes terribles, madame. Je suis allée me promener pour les soulager. Parfois, marcher m’aide à supporter la douleur. J’ai dû perdre mon mouchoir en chemin. Madame la roche l’observa longuement puis retourna s’asseoir.

 Elle ouvrit un tiroir de son bureau et en sortit une lettre jaunie. Cette lettre, je l’ai trouvé parmi les affaires de mon époux après sa mort. Elle est adressée à Henry Des Beauviliers. Tu connais ce nom, n’est-ce pas ? Le sang de Roselise se fija dans ses veines. Non, madame, je ne connais pas ce monsieur.

 Vraiment ? Pourtant, mes domestiques m’ont rapporté que tu lui avais parlé au marché la semaine dernière. Ils t’ont vu t’approcher de lui, chuchoter quelque chose à son oreille. Roselise réalisa qu’elle avait été surveillée bien plus étroitement qu’elle ne l’avait imaginé. Madame la Roche avait des yeux et des oreilles partout. Je je lui ai simplement demandé s’il avait besoin de quelque chose.

 C’est mon devoir d’être poli avec les visiteurs du marché. Madame Laroche se leva et se dirigea vers la fenêtre donnant sur les champs de Canne. Mon défunt époux était un homme complexe Rosel. Il avait ses propres idées sur la façon de gérer cette plantation, sur la façon de traiter nos esclaves. Certaines de ses idées étaient dangereuses. Elle se retourna tenant toujours la lettre.

 Cette lettre parle de marchandise spécial à transporter vers les îles britanniques. Elle mentionne des cargaisons humaines et des livraisons discrètes. Mon époux était impliqué dans quelque chose d’illégal, quelque chose qui aurait pu nous ruiner tous. Après sa mort, j’ai trouvé certaines choses troublantes parmi ses affaires, des lettres, des contacts avec des personnes aux idées subversives. J’ai préféré détruire ces documents pour protéger sa mémoire et notre famille.

 Madame Laro se retourna vers Rosel, son regard perçant. Mais il se pourrait que j’ai oublié quelque chose, quelque chose qui pourrait tomber entre de mauvaises mains et causer beaucoup de problèmes. Je ne sais pas de quoi vous parlez, madame. Vraiment ? Alors, explique-moi pourquoi tu as passé tant de temps dans la cave l’autre jour.

 Mes autres domestiques m’ont dit que tu y étais resté bien plus longtemps que nécessaire pour un simple nettoyage. Et quand je suis descendu vérifier ton travail, j’ai remarqué que certains meubles avaient été déplacés. Rosele sentit la sueur perler sur son front. Elle était prise au piège mais elle ne pouvait pas abandonner maintenant.

 La cave était très sale, madame. J’ai voulu faire du bon travail. J’ai dû déplacer les meubles pour nettoyer derrière. Soudain, des cris retentirent depuis la cour de la plantation. Madame la Roche fronça les sourcils et se dirigea vers la fenêtre. Dans la cour, plusieurs esclaves étaient rassemblés autour d’un homme à cheval.

 Roselyise reconnut immédiatement monsieur des Beauviliers et son cœur bondit dans sa poitrine. “Qu’est-ce qu’il fait ici ?” murmura madame la roche, sa voix trahissant une inquiétude grandissante. Monsieur des Beauviliers descendit de cheval et se dirigea vers la maison d’un pas décidé.

 Il portait ses plus beaux habits et affichait l’assurance d’un homme d’affaires venu conclure une transaction importante. Quelques minutes plus tard, il frappait à la porte du bureau. “Madame la roche !” dit-il en entrant avec un sourire courtois. “J’espère que je ne vous dérange pas. Je venais vous proposer d’acheter quelques-uns de vos esclaves. Ma plantation manque de main d’œuvre pour la récolte qui approche.

 Madame la roche le regarda avec suspicion, ses doigts se crispant sur la lettre qu’elle tenait toujours. C’est inhabituel, Henry. Vous n’avez jamais manifesté d’intérêt pour acheter mes esclaves auparavant et vous avez toujours prétendu avoir suffisamment de travailleurs. Les temps changent, Françoise.

 Et j’ai entendu dire que vous aviez des difficultés financières depuis la mort de votre époux. Je pensais pouvoir vous aider tout en résolvant mes propres problèmes. Roslie comprit immédiatement la stratégie de Monsieur des Beauviliers. Il était venu la chercher, prétextant un achat d’esclave pour la sortir légalement de la plantation.

 Mais madame la Roche n’était pas dupe. Mes difficultés financières, si elles existent, ne vous regarde pas, répliqua-t-elle sèchement. Et mes esclaves ne sont pas à vendre. Ils sont parfaitement formés et adaptés à ma plantation. Même cette jeune femme ? Demanda monsieur des Beauviliers en désignant Rosel. Elle me semble bien formée pour le travail domestique. Je serais prêt à payer un bon prix.

 Le silence qui suivit était lourd de tension. Madame la Roche regardait alternativement Monsieur des Beauviliers et Roselise et son expression se durcissait progressivement. Elle posa la lettre sur son bureau et croisa les bras. “Je vois”, dit-elle finalement. “V vous connaissez déjà, n’est-ce pas ? cette petite comédie au marché, cette rencontre nocturne à la Chapelle, tout était planifié.

 Avant que quiconque puisse répondre, elle se dirigea vers un tiroir de son bureau et en sortit un pistolet. L’arme brillait dans la lumière matinale qui filtrait par la fenêtre. Mon époux m’avait mise en garde contre vous, Henry. Il disait que vous aviez des idées dangereuses, que vous étiez capable de corrompre nos esclaves avec vos théories sur la liberté. Monsieur des Beauviliers leva les mains en signe d’apaisement.

 Mais son regard restait calme et déterminé. Françoise, soyez raisonnable. Nous pouvons discuter de tout cela calmement. Il n’y a aucune raison de recourir à la violence. Il n’y a rien à discuter. Vous êtes venu chercher ma domestique parce qu’elle a trouvé quelque chose qu’elle n’aurait pas dû trouver.

 Et maintenant, vous allez tous les deux me dire exactement de quoi il s’agit. Roselise sentit que le moment de vérité était arrivé. Elle pouvait continuer à mentir et espérer s’en sortir où elle pouvait prendre le risque de tout révéler. Elle pensa à tous les esclaves de la plantation, à leur visage résigné, à leurs rêve brisés.

 Elle pensa à la liberté qui lui tendait les bras si proches et pourtant si lointaine. Elle pensa aussi aux paroles de monsieur des Beauviliers. Parfois, il fallait risquer sa vie pour ses convictions. “J’ai trouvé les documents de votre époux”, dit-elle finalement, sa voix tremblant légèrement mais ferme dans sa résolution.

 les papiers d’affranchissement, les lettres sur le réseau d’aide au fugitif. Je sais tout sur ces activités secrètes. Madame Laroche accusa le coup, ses traits se décomposant momentanément, mais elle garda son arme pointée sur eux. Et qu’est-ce que tu comptes faire de ces informations ? Les utiliser pour aider d’autres personnes à retrouver leur liberté comme votre époux l’aurait voulu. Il croyait en la justice, en l’égalité entre tous les êtres humains. Mon époux était un fou.

 Ces idées romantiques sur la liberté ont failli nous ruiner. Je ne laisserai pas ces erreurs détruire ce que notre famille a construit pendant des génération. Soudain, des bruits de pas précipités raisonnèrent dans le couloir. La porte s’ouvrit brutalement et plusieurs esclaves de la plantation entrèrent, menés par Tobias.

 Ils avaient entendu la dispute et étaient venus voir ce qui se passait. Leur visage exprimaient un mélange de peur et de détermination. Madame”, dit Tobias d’une voix ferme, ses mains tremblant légèrement, mais son regard résolut. “Nous ne voulons pas de violence, mais nous ne laisserons pas Roseles être puni pour avoir rêvé de liberté.

” Derrière lui, d’autres esclaves apparaissaient : Marie la cuisinière, Jacques le jardinier, Céleste qui s’occupait de la lessive et bien d’autres encore. Il formaient une chaîne humaine silencieuse mais déterminée. Madame la Roche regarda autour d’elle, réalisant qu’elle était désormais en minorité.

 D’autres esclaves apparaissaient dans l’encadrement de la porte, leur visage déterminé malgré la peur. Pour la première fois de sa vie, elle se trouvait face à une rébellion ouverte de ses propres esclaves. Monsieur des Beauviliers profita de la confusion pour s’approcher d’elle. Françoise, vous pouvez encore faire le bon choix. Laissez-nous partir et nous ne révélerons rien de ce qui s’est passé ici. Vous pourrez continuer à vivre comme avant.

 Mame la Roche hésita longuement, son regard passant de son pistolet au visage qui l’entourait. Elle voyait dans leurs yeux quelque chose qu’elle n’avait jamais remarqué auparavant. De l’espoir, de la dignité, de la détermination. Pour la première fois, elle réalisait qu’ils n’étaient pas simplement des biens, mais des êtres humains avec leurs propres rêves et aspiration. Finalement, elle baissa son arme et s’effondra dans son fauteuil.

Soudain vieillit de dix an. “Partez dit-elle d’une voix brisée. Partez tous et ne revenez jamais, mais sachez que vous ne survivrez pas longtemps là-bas. Le monde extérieur est cruel pour les gens comme vous. Nous préférons mourir libre que vivre en esclavage, répondit Roslee avec une dignité qui surprit même madame Lar Roche.

 3 heures plus tard, Roselee se trouvait sur le pont d’un navire marchand dans le port de Pointe à Pitre. Le soleil était haut dans le ciel et l’air marin apportait une fraîcheur bienvenue après la chaleur étouffante de la plantation. Monsieur des Beauviliers avait tenu sa promesse. Elle était libre. Autour d’elle, quinze autres esclaves de diverses plantations regardèrent s’éloigner les côtes de la Guadeloupe, leurs yeux brillants de larmes et d’espoir.

 Le capitaine du navire, un homme robuste aux cheveux blancs et au regards bienveillants, leur avait expliqué le voyage qui les attendait. Ils feraient d’abord escale à la barbade, puis continueraient vers le Venezuela où il pourraient commencer une nouvelle vie. Il leur avait aussi parlé des communautés d’anciens esclaves qui s’étaient établis là-bas, des écoles qui avaient été créées, des opportunités de travail qui existaient.

 Le navire faisait route vers la barbade puis vers l’Amérique du Sud. Là-bas, il pourrait commencer une nouvelle vie, loin des chaînes et de l’oppression. Rosele pensait à madame L, seule dans sa grande maison, et elle se demandait si elle comprendrait un jour que la liberté n’était pas un rêve romantique, mais un droit fondamental de tout être humain.

Tobias était à côté d’elle, tenant la main de sa femme Marie. Ils avaient laissé derrière eux leurs trois enfants, trop jeunes pour le voyage, mais ils espéraient pouvoir les faire venir plus tard. D’autres familles avaient fait des choix similaires, déchirants mais nécessaires.

 Alors que le soleil se couchait sur l’horizon, peignant le ciel de couleur flamboyante, Roslie serra dans sa main les documents qu’elle avait récupéré de la cave. Il servirait à aider d’autres personnes à retrouver leur liberté. L’héritage de Monsieur Laroche vivrait et avec lui l’espoir d’un monde meilleur. Le secret enfoui dans la cave avait libéré bien plus qu’une seule personne.

 Il avait révélé la vérité sur la force de l’esprit humain face à l’injustice et sur le pouvoir de l’espoir de transformer même les situations les plus désespérées en opportunité de changement. Alors que les étoiles commençaient à apparaître dans le ciel tropical, Roslee savait que leur voyage ne faisait que commencer.

 Mais pour la première fois de sa vie, elle regardait l’avenir avec espoir et détermination. Merci d’avoir suivi cette histoire captivante de courage et de liberté. Si cette aventure vous a plu, n’hésitez pas à nous dire de quelle ville vous nous suivez en commentaire. Nous adorons savoir d’où viennent nos fidèles auditeurs.

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