Philippe de Villiers sur la vidéo de l'Élysée qui l'attaque : "Macron est  sorti de ses fonctions"

L’arène médiatique française est secouée par une confrontation d’une gravité inédite. Au cœur du débat : la proposition présidentielle de labelliser les médias et, plus largement, la dérive jugée autoritaire du pouvoir en place. Sur le plateau de CNews, l’ancien secrétaire d’État et fondateur du Puy du Fou, Philippe de Villiers, a lancé une diatribe puissante et structurée, non seulement contre l’Élysée qui l’a visé par un tweet, mais contre ce qu’il perçoit comme l’instauration progressive d’un nouveau système totalitaire, à l’échelle française et européenne.

L’analyse de Philippe de Villiers s’articule autour de deux axes majeurs : la « guerre de la négation » menée contre la générosité et la création de valeur, et la menace existentielle qui pèse sur la liberté d’expression. Son diagnostic est sans appel : la fin de la Macronie serait marquée par une menace totalitaire, symbolisée par le projet de « label de confiance » pour les médias.

L’Esprit de la Négation : La Guerre Contre le Bien Commun

Avant d’aborder la polémique élyséenne, Philippe de Villiers a tenu à dénoncer un fait divers lourd de sens, passé sous silence, selon lui, par le monde politico-médiatique : les violences qui ont émaillé la tenue de l’événement caritatif « La Nuit du Bien Commun » aux Folies Bergères.

Ce gala, qui a permis de collecter 8 millions d’euros cette année (et 28 millions depuis 2017) au profit d’associations humanitaires, sociales et patrimoniales (aide aux personnes handicapées, vacances pour les défavorisés, etc.), se voulait « apolitique et aconfessionnel ». Pourtant, il a été la cible de 350 manifestants, décrits comme des collectifs d’« ultra-gauche », qui ont eu recours à des tirs de mortiers et blessé des policiers.

Pour De Villiers, ce silence est la « synthèse » de ce qu’est la gauche contemporaine : « l’esprit qui toujours nie », reprenant la phrase de Méphisto dans Faust. Cette gauche nie « le réel, elle nie l’idéal qui n’est pas le sien ». Elle ne supporte pas la « gratuité par excellence », l’acte d’« oblation » et de donation désintéressée, surtout lorsqu’il émane d’individus ou d’associations qui ne sont pas sous son contrôle.

L’ancien président du Conseil général de la Vendée va au fond des choses : la gauche s’est autoproclamée seule « habilitée à exercer dans la société la générosité », à incarner l’associatif ou le culturel. « On ne peut pas être de droite et être généreux », résume-t-il, ironiquement. En s’attaquant à la Nuit du Bien Commun, ce n’est pas un gala politique qui est visé, mais bien l’émergence de « tissus conjonctifs d’une France qui ne veut pas mourir », une France qui incarne l’humanitaire, le culturel et l’associatif en dehors du monopole idéologique.

Le Lynchage du Succès : L’Anti-Modèle Bernard Arnault

Le même esprit de négation s’incarne, selon De Villiers, dans le traitement réservé aux grands entrepreneurs français, citant nommément Bernard Arnault, récemment ciblé par une émission d’investigation. Qualifiant les journalistes en question de « policiers journalistes » pratiquant un travail « totalement bidon », il y voit l’illustration parfaite du « lynchage de tout ce qui marche, le lynchage de tout ce qui réussit. »

Tổng thống Pháp Emmanuel Macron phớt lờ yêu cầu từ chức | Báo điện tử Tiền  Phong

L’objectif, martèle-t-il, est de « détruire tout ce qui s’apparente à un modèle » pour ériger l’« anti-héros ». Bernard Arnault, premier contributeur fiscal de France et créateur de milliers d’emplois, est pour De Villiers un « grand capitaine d’industrie » qui a pris des risques considérables. L’homme politique rappelle une anecdote personnelle où Arnault, à sa demande, a investi en Vendée pour sauver des savoir-faire traditionnels (textile, cuir, chaussure) menacés par la mondialisation, créant ainsi 900 emplois.

Arnault est présenté comme le sauveur de 280 savoir-faire français et un grand donateur (200 millions d’euros pour Notre-Dame de Paris). La démolition de ces figures de réussite et de générosité, selon De Villiers, participe à l’éclipse des « valeurs françaises » et du « Bien Commun ». Il propose même, en réaction à ce qu’il appelle l’« entreprise de démolition » du service public, de créer une émission nommée « Complément de modèle ».

La Vindicte de l’Élysée et le « Geek » Présidentiel

C’est sur le terrain de la liberté d’expression que la critique de Philippe de Villiers atteint son paroxysme. L’Élysée lui ayant répondu sur les réseaux sociaux suite à ses précédentes déclarations, il en tire la preuve d’une fébrilité et d’un manquement à la hauteur de la fonction.

Il dénonce deux fautes présidentielles. La première est la « jactance » ou le « bavardage numérique », un manquement à l’« Impératoria Brevitas », cette « brièveté impériale » qui devrait caractériser le chef d’État, qui doit rester « laconique, mystérieux. » La seconde est la « vindicte », transformant le président en un « Ludion » qui se mue en « tireur d’élite sniper » visant des médias spécifiques comme CNews.

Pour De Villiers, l’image du président en « geek » dont le « doigt est le même doigt qui peut appuyer sur le bouton nucléaire » révèle une fébrilité dangereuse. Mais l’enjeu dépasse la simple querelle médiatique. Il s’agit du projet de labellisation des médias défendu par Emmanuel Macron (via la Journalism Trust Initiative et Reporters sans frontières), qui vise à distinguer les « bons médias » des « moins bons » ou des « dignes de confiance » des autres.

De Shigaliov au Ministère du Mensonge : La Fabrique de la Vérité

Dans cette initiative, Philippe de Villiers décèle les prémices d’un régime autoritaire. Il l’assimile au « Chigaliovisme », du nom du personnage de Dostoïevski dans Les Possédés. Shigaliov a voulu proposer un système d’organisation du monde, partant de la « liberté illimitée » pour arriver au « despotisme illimité », où un dixième de l’humanité impose le despotisme aux neuf dixièmes restants. La parabole du label, affirme De Villiers, c’est cela : l’usage d’un mot noble — la confiance — pour masquer une volonté de contrôle absolu.

Il établit ensuite un parallèle glaçant avec le « Ministère de la Vérité » de George Orwell dans 1984. Cette institution du régime totalitaire d’Océania n’a pas pour but de dire la vérité, mais de la « fabriquer » en réécrivant les journaux, les statistiques et les archives, assurant ainsi la « maîtrise absolue du récit collectif » et la « destruction de toute mémoire indépendante. » Le ministère de la vérité est en réalité le « ministère du mensonge et de la propagande. »

Le label est ce « filtre » que le pouvoir veut installer pour distinguer la « bonne information » — celle qui est « conforme à l’idéologie dominante » et qui peut aller jusqu’aux oreilles du public — de la « mauvaise information », celle qui serait faite de « petits cailloux » dans la chaussure du pouvoir. Cette labellisation est une « accréditation » donnée par des gens « habilités à faire le tri », ce qui mène inéluctablement à un contrôle totalitaire.

De Villiers se justifie également sur sa formule choc de la « peste brune et de la peste rouge » (nazisme et communisme, deux régimes totalitaires ayant en commun de chercher à « absorber » la liberté). Il détaille les quatre méthodes des régimes totalitaires qu’il voit à l’œuvre aujourd’hui :

    La monopolisation des canaux d’information : illustrée par la préemption du service public sur les fréquences hertziennes, limitant la place de la « parole alternative. »

    L’agrément par un ordre corporatif : confier à un corps de métier (l’Union des Écrivains chez les Soviétiques, les professionnels des médias ici) le soin de décerner les brevets de conformité. C’est l’« univers du mensonge » : « Nous savons qu’ils nous mentent. Ils savent que nous savons qu’ils nous mentent. »

    La judiciarisation : l’usage d’« infractions élastiques » pour intimider et transformer l’opposant en « déviant, démon ou délinquant. »

    L’autosurveillance : la peur de sortir du « périmètre sanitaire » qui mène à l’« avachissement des consciences » et, selon Bernanos, au risque de désapprendre à aimer la liberté.

Le « Nœud Couland Numérique » Européen

Philippe De Villiers : "Macron fait le grand remplacement"

L’idée de labellisation n’est pas un acte isolé, prévient Philippe de Villiers, mais s’inscrit dans un « dispositif européen liberticide » qu’il qualifie de « nœud coulant numérique à quatre boucles » autour de nos libertés fondamentales :

    Le DSA (Digital Service Act) : Cette directive permet de pousser les contenus labellisés et d’écarter ou de reléguer les contenus « non conformes », traquant ainsi « toute forme de dissidence » au nom de la lutte contre la désinformation.

    Le Portefeuille d’identité numérique : Le citoyen devient un « QR code en liberté conditionnelle », la « clé de voûte d’un pilotage généralisé des corps et des comportements. » Fiché, noté, géolocalisé, il devient un « flux de données » soumis à une carte de « crédit social. »

    Le Chat Control : La fin des correspondances privées, scannées, analysées et contrôlées sans mandat judiciaire ni suspicion, instaurant une « surveillance de masse généralisée. »

    La Labellisation (avec l’Euro Numérique) : L’euro numérique, c’est la fin de l’argent liquide et la traçabilité totale. Combiné au système de notation sociale, il permet de « couper les vivres » et de faire du citoyen à risque un « non-citoyen. »

Ce dispositif d’ensemble, inspiré par la Chine, est pour Philippe de Villiers une « architecture de notation sociale » où les citoyens à risque seront « repérés, scannés et exclus. » Un « système totalitaire » est donc en train de se mettre en place.

En conclusion de son intervention, Philippe de Villiers sonne l’alarme face à un pouvoir qui, par sa « vindicte » et son désir de contrôle du récit collectif, s’éloigne des fondements de la démocratie. Le danger ultime, celui que pointait George Orwell, n’est pas tant de perdre la liberté que d’imaginer « une botte qui piétine un visage humain éternellement. » Le débat sur le label médiatique est, selon lui, le signal de départ d’une entreprise de démolition de la liberté individuelle qui nécessite une prise de conscience urgente.