Emmanuel Macron annonce une aide internationale de plus d’1,5 milliards d’euros pour la région des Grands Lacs en Afrique

Le président Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé la réouverture de l’aéroport de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), pour des vols humanitaires « dans les prochaines semaines ».

Le président Emmanuel Macron a promis un soutien financier massif pour la région des Grands Lacs, visant à répondre aux besoins humanitaires urgents identifiés par l’ONU en Afrique

Le président français Emmanuel Macron a annoncé jeudi une aide internationale de plus d’1,5 milliards d’euros pour la région des Grands Lacs, dans le cadre du plan de réponse humanitaire des Nations Unies.

« Aujourd’hui, ensemble, nous avons franchi une étape et je suis fier d’annoncer que vous avez collectivement mobilisé plus de 1 milliard et demi d’euros d’assistance pour les populations les plus vulnérables », a-t-il déclaré en clôture d’une conférence internationale à Paris, précisant qu’il s’agit d’apporter notamment médicaments et nourriture.

Le président Emmanuel Macron a par ailleurs annoncé la réouverture de l’aéroport de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), pour des vols humanitaires « dans les prochaines semaines » ainsi que des couloirs humanitaires sécurisés pour l’acheminement de l’aide.

Macron annonce une aide internationale de plus d'1,5 milliard d'euros pour  la région des Grands Lacs | La Gazette France

C’est une statistique qui glace le sang, un chiffre qui défie l’entendement humain et qui, pourtant, résume l’abîme. Dans l’Est de la République Démocratique du Congo, une femme est violée toutes les quatre minutes. Un enfant, toutes les trente minutes.

Ces chiffres, d’une violence inouïe, ont été le sombre décor de la “Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs”, qui s’est tenue à Paris ce jeudi 30 octobre 2025. Alors que le monde semblait avoir succombé à une “fatigue humanitaire”, détournant le regard d’un conflit qui n’en finit pas de pourrir, le président français Emmanuel Macron a tenté de créer un électrochoc.

Devant un parterre d’une soixantaine de pays et d’organisations internationales, le chef de l’État a frappé fort : une mobilisation internationale de plus de 1,5 milliard d’euros sera débloquée pour répondre à la crise humanitaire la plus grave, et la plus ignorée, de la planète.

Cette annonce, accueillie avec un mélange d’espoir et de scepticisme, ne doit pas masquer la complexité d’un drame où l’argent, seul, ne peut acheter la paix. Car à Paris, ce n’était pas seulement une question d’aide ; c’était un acte diplomatique tendu, une tentative désespérée de ranimer un processus de paix moribond.

L’anatomie d’une catastrophe “oubliée”

Pour comprendre l’urgence de ce sommet parisien, il faut regarder les chiffres en face. La région des Grands Lacs, et plus particulièrement l’Est de la RDC (Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri), est le théâtre d’une offensive dévastatrice du groupe armé M23. Cette rébellion, qui selon de nombreux rapports de l’ONU est soutenue activement par le Rwanda voisin, a plongé la région dans un chaos absolu.

Le bilan humain est une litanie d’horreurs. Selon les Nations Unies, près de 28 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire. 21 millions de Congolais ont un besoin vital d’aide humanitaire. 5,7 millions de personnes sont des déplacés internes, jetés sur les routes par les combats. Et puis il y a ces violences sexuelles, utilisées comme une arme de guerre systématique, qui brisent les corps et les communautés.

La situation était si désespérée que les financements internationaux, eux, commençaient à baisser. “On constate, en matière d’aide humanitaire, une certaine fatigue”, confiait un diplomate avant le sommet. La conférence de Paris avait donc un but premier : remettre cette tragédie sous les projecteurs et rouvrir les portefeuilles.

Un sommet sous haute tension politique

Grands Lacs: Macron annonce une aide internationale de plus d'1,5 milliard  d'euros | La Gazette France

Mais l’argent ne règle pas tout. La présence à Paris du président congolais, Félix Tshisekedi, et du président togolais, Faure Gnassingbé, aux côtés d’Emmanuel Macron, soulignait l’autre enjeu : la politique.

Félix Tshisekedi n’a pas mâché ses mots. Il a profité de cette tribune internationale pour, une nouvelle fois, dénoncer “la responsabilité du Rwanda et du M23” dans la crise. L’absence de son homologue rwandais, Paul Kagame, pourtant “attendu” selon certaines sources, était assourdissante.

Comment parler de paix quand les principaux acteurs se regardent en chiens de faïence ? Le M23 contrôle des pans entiers du territoire, y compris les alentours de Goma, une ville stratégique. Cette situation paralyse non seulement la vie de millions de personnes, mais aussi l’acheminement de l’aide.

Le président togolais, Faure Gnassingbé, a mis les pieds dans le plat en pointant du doigt un autre fléau : la corruption et le détournement de l’aide. “Les routes humanitaires sont parfois contrôlées, les convois taxés, les ressources détournées”, a-t-il déploré, appelant l’Afrique à participer à son propre effort humanitaire, “non pas seulement par devoir moral, mais parce que c’est une question de dignité”.

Les promesses concrètes de Macron

Face à ce mur de défis, l’annonce d’Emmanuel Macron se veut plus qu’un simple chèque. Le 1,5 milliard d’euros d’aide “internationale” – la France y prenant sa part – doit s’accompagner de mesures concrètes pour garantir que l’aide arrive à bon port.

Première annonce clé : la réouverture de l’aéroport de Goma aux vols humanitaires “dans les prochaines semaines”. Fermé à cause des combats, cet aéroport est le poumon logistique de toute la région. Sans lui, l’aide ne peut être acheminée massivement. C’est un pari risqué, qui suppose une trêve, au moins partielle, du M23 qui contrôle la zone.

Deuxième promesse : la mise en place de couloirs humanitaires sécurisés. C’est une réponse directe aux inquiétudes de Faure Gnassingbé. Il s’agit de négocier avec toutes les parties – y compris les groupes armés – pour que les convois de nourriture et de médicaments ne soient plus des cibles ou des vaches à lait.

Enfin, Emmanuel Macron a insisté sur la “transparence” de l’aide. Dans un contexte de guerre, a-t-il sagement averti, l’aide humanitaire “a tendance elle-même à devenir un enjeu de pouvoir”. Traduction : il faut éviter que l’aide ne nourrisse les milices ou ne soit utilisée comme un outil de pression politique.

Un “signal important”, mais la paix reste loin

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Cette conférence de Paris s’inscrit dans un paysage diplomatique fracturé. Deux processus de paix parallèles tentent, sans grand succès jusqu’ici, de calmer le jeu. L’accord de Washington, qui concerne la RDC et le Rwanda, et le processus de Doha, qui tente de faire dialoguer Kinshasa et le M23.

La conférence de Paris est donc une “nouvelle étape diplomatique”, comme l’a souligné le ministère français des Affaires étrangères. Une façon de remobiliser la communauté internationale (notamment les médiateurs américains et qataris, présents à Paris) autour d’un objectif commun : empêcher l’effondrement total.

Pour les ONG sur le terrain, l’annonce est une bouffée d’oxygène. Luc Lamprière, directeur du Forum des ONG internationales en RDC, a salué un “signal important”. Mais l’enthousiasme est prudent.

Le 1,5 milliard d’euros est une somme colossale, mais elle sera versée à des agences de l’ONU et à des ONG qui doivent naviguer dans un véritable champ de mines. La méfiance entre Kinshasa et Kigali est à son comble. Le M23 n’a montré aucun signe de vouloir déposer les armes. Et la population, elle, continue de souffrir.

En clôturant ce sommet, Emmanuel Macron n’a pas promis la paix. Il a promis les moyens de survivre. Il a rappelé au monde que derrière les conflits géopolitiques complexes, il y a des visages, des familles, et des corps meurtris. L’argent débloqué à Paris n’achètera pas la fin de la guerre, mais il doit, impérativement, acheter du temps, de la nourriture, des soins, et peut-être, un peu de dignité. L’espoir est fragile, mais pour 28 millions de personnes, il est tout ce qui reste.