« Tu as besoin d’un foyer, et j’ai besoin d’une maman… » Dit la petite fille à la jeune femme sans-abri dans le bus…

Peut-être une image d'enfant et de rue

Tu as besoin d’un foyer et j’ai besoin d’une maman. La pluie était incessante cet après-midi-là, tambourinant contre l’abribus comme des doigts impatients. Blotti sur le banc froid se trouvait Sophie, une jeune femme de 23 ans, sans manteau, sans bagages, juste un sac à dos effiloché et un gobelet à café en carton à moitié rempli de pièces.

Elle était sans abri depuis six mois, chaque jour se confondant avec le suivant, chaque nuit plus froide que la précédente. Son reflet dans la vitre révélait des yeux fatigués et des cheveux qui avaient perdu leur éclat depuis longtemps. Elle fixait les flaques d’eau lorsqu’une petite voix perça la tempête.

Salut. Tu as vraiment froid. Sophie se retourna.

Une petite fille, peut-être sept ans, se tenait là, tenant un parapluie rose bien trop grand pour elle. Elle avait des tresses châtain, des yeux vert vif et ce sourire curieux que seuls les enfants ont. Je vais bien.

Sophie mentit, attendant simplement le bus. La fille pencha la tête, l’observant longuement, puis dit quelque chose qui coupa le souffle à Sophie. Tu as besoin d’un foyer et j’ai besoin d’une maman.

Sophie se figea. Elle jeta un coup d’œil autour d’elle, s’attendant à voir un parent à proximité. Effectivement, un homme d’une trentaine d’années, en costume sur mesure, s’avançait vers eux, deux sacs de courses à la main.

Lila, qu’est-ce que je t’avais dit sur le fait de parler aux inconnus ? demanda l’homme d’une voix ferme, mais pas méchante. Mais « Papa », protesta la fille, « elle a l’air triste, elle a l’air seule ». L’homme soupira, visiblement habitué à la façon dont sa fille dit ce qu’elle pense.

Allez, il faut qu’on y aille. Mais Lila ne bougeait pas. S’il te plaît, papa, peut-elle venir à la maison avec nous ? Sophie eut un petit rire gêné…

C’est adorable, mais elle vit alors le père la regarder à nouveau. Son regard s’attarda, d’abord sur ses vêtements humides, puis sur le gobelet en carton. Il y avait quelque chose sur son visage qui n’était pas de la pitié, mais de la reconnaissance.

Tu es… Sophie, c’est ça ? Tu travaillais au Miller’s Café. Sophie cligna des yeux, ouais, je… Je me souviens de toi, tu venais tous les matins prendre un cappuccino. Il hocha lentement la tête, je croyais que tu t’étais éloignée.

Sophie hésita. J’ai perdu mon travail, puis mon appartement, les choses… sont arrivées comme ça. L’homme serra les dents et personne ne t’aida.

Sophie força un sourire. « Ça ira, vraiment. » Mais Lila glissa sa petite main dans celle de Sophie. « Je crois que tu es déjà mon amie », murmura-t-elle.

Quelque chose se fendit en Sophie, quelque chose qu’elle retenait depuis des mois. Elle déglutit difficilement, retenant ses larmes. L’homme semblait aux prises avec quelque chose.

Finalement, il dit : « Je… Je ne peux pas m’en aller comme ça. » Il tendit à Sophie un des sacs de courses. « Allez, c’est juste le dîner, rien de plus. »

Sophie voulait dire non. L’orgueil lui criait de garder ses distances. Mais la chaleur de l’étreinte de Lila était trop forte pour y résister.

Au début, le dîner fut gênant. Sophie était assise à la table en chêne poli, craignant de toucher quoi que ce soit, jusqu’à ce que Lila s’installe à côté d’elle et commence à bavarder de son école, de ses dessins animés préférés et de son poisson rouge nommé M. Bubulle. Le père, Daniel, écoutait tranquillement, posant de temps en temps de petites questions à Sophie…

Lentement, elle commença à se détendre. Au milieu du repas, Lila dit soudain : « Tu verras papa, rit-elle, elle serait une maman formidable. » Daniel regarda Sophie un long moment.

Tu n’es pas obligée de lui répondre, dit-il doucement, mais si jamais tu as besoin d’un endroit pour te remettre sur pied, j’ai une chambre d’amis, sans engagement. Les semaines passèrent, Sophie emménagea dans la chambre d’amis pour un temps. Elle aida à faire la vaisselle, alla chercher Lila à l’école et se remit à dessiner.

Quelque chose qu’elle aimait avant que la vie ne s’écroule. Un soir, alors que Sophie bordait Lila, la petite fille murmura : « Je te l’avais dit, tu avais besoin d’un foyer et moi d’une maman. » Cette fois, Sophie ne la corrigea pas.

Elle embrassa Lila sur le front et dit que peut-être nous avions besoin l’une de l’autre. Épilogue : un an plus tard, Sophie n’était plus une simple invitée, elle faisait partie de la famille. Elle avait un travail, un compte épargne et une petite fille qui l’appelait maman.

Parfois, la gentillesse ne se résume pas à de grands gestes. Il s’agit du simple courage d’un enfant de parler avec son cœur. Car ce jour pluvieux, à un arrêt de bus solitaire, sept mots ont changé deux vies à jamais.

Tu as besoin d’une maison et j’ai besoin d’une maman.