Linda Hardy, de Miss France à comédienne : l’année Ardisson et la rencontre avec Jamel Debbouze

Un an avant de faire ses premiers pas dans la série culte H, Linda Hardy croisait déjà la route de Jamel Debbouze, un soir de plateau télé orchestré par Thierry Ardisson. C’était à la fin des années 1990, sur le plateau de Tout le monde en parle. Ce soir-là, entre éclats de rire, joutes verbales et charme spontané, se nouait un moment de télévision devenu culte — et peut-être aussi un tournant discret dans la carrière de l’ancienne Miss France.

Thierry Ardisson, l’homme en noir qui a marqué la télévision

Lorsque Thierry Ardisson nous a quittés le 14 juillet 2025, des suites d’un cancer, c’est une voix singulière et un ton unique qui se sont tus. L’animateur, connu pour son humour noir et ses entretiens sans concessions, laisse derrière lui un héritage immense : des émissions devenues emblématiques comme Bains de minuit, Lunettes noires pour nuits blanches, Rive droite / Rive gauche ou encore 93, faubourg Saint-Honoré.
Son esprit libre et provocateur plane toujours sur sa chaîne YouTube “INA Arditube”, où l’on retrouve les plus grands moments de ses émissions.

Mais c’est sans doute avec Tout le monde en parle qu’il aura marqué le plus durablement la mémoire collective. Ce talk-show, diffusé sur France 2, réunissait chaque semaine artistes, intellectuels, politiques et humoristes dans un joyeux chaos orchestré par le “homme en noir”.
Ardisson en fut l’animateur principal dès le lancement, d’abord en solo, avant de partager l’aventure avec Laurent Ruquier en 1999, puis avec Linda Hardy de 1999 à 2000. Après leur départ, il poursuivit l’émission avec Laurent Baffie, complice de longue date, jusqu’à son arrêt en 2006.

L’année Ardisson de Linda Hardy : entre glamour et désillusion

Lorsqu’elle rejoint l’équipe de Tout le monde en parle, Linda Hardy est déjà connue du grand public. Élue Miss France 1992, elle a depuis entamé une carrière de mannequin, tout en nourrissant le rêve de devenir actrice. Belle, éloquente, et dotée d’une vraie présence, elle semblait taillée pour le petit écran.

Pourtant, cette expérience télévisuelle ne sera pas à la hauteur de ses attentes. En 2019, dans un portrait publié par Paris Match, elle confiait sans détour :

« Je n’ai pas aimé jouer la potiche aux côtés de Thierry Ardisson. »
Elle expliquait avoir « claqué très vite la porte », refusant de rester dans un rôle de simple faire-valoir. Cette décision marquera une rupture nette, mais aussi un choix fort : celui d’une femme qui refuse de n’être qu’une image.

Les journalistes de Paris Match soulignaient d’ailleurs qu’elle avait “ouvert la voie à une nouvelle génération de Miss France, capables de capitaliser sur leur notoriété pour construire de véritables carrières”.

Des études de médecine à la passion du jeu

Avant la télévision, Linda Hardy avait un tout autre rêve : devenir pédiatre. Mais le destin en décida autrement. Mannequin pendant quelques années, elle réalise peu à peu que son avenir se trouve ailleurs. La jeune femme aspire à jouer, à incarner des personnages, à raconter des histoires.

Après une apparition remarquée dans le film Recto-verso de Jean-Marc Longval, sa carrière prend un tournant inattendu. Un soir, sur le plateau de Tout le monde en parle, elle rencontre Jamel Debbouze, alors jeune humoriste en pleine ascension, venu défendre son spectacle Jamel en scène, joué à la Cigale.
Ce moment, à la fois drôle et touchant, restera gravé dans les mémoires. Substituant au pied levé Laurent Ruquier, Linda Hardy s’installe face à Ardisson et Jamel. Le maître des lieux, fidèle à son humour acide, ironise sur sa prétendue “chirurgie esthétique réussie”. Mais la conversation prend rapidement un autre tour : entre Linda et Jamel, le courant passe immédiatement.

Une rencontre pleine de charme et de malice

Face à l’humoriste, Linda Hardy le complimente avec sincérité :

« Vous êtes encore plus beau en vrai qu’à la télévision. »
Un mot simple, mais qui fait mouche. De son côté, Jamel, taquin et charmeur, joue le jeu, lui glissant avec humour qu’il “ne savait pas qu’il avait une touche”. L’échange est ponctué de rires, de petites piques et d’une complicité évidente. Ardisson, en chef d’orchestre, en profite pour diffuser quelques “vidéos dossiers” retraçant les débuts de Jamel : sa première apparition télé dans Paris Dernière en 1996, puis un passage dans le Journal de la nuit en 1999 où il taquine Laurent Gerra.

Peut-être est-ce ce soir-là que Linda Hardy comprend que la caméra l’aime vraiment. Devant l’objectif, elle se sent à sa place, libre et vivante. Et quelques mois plus tard, le destin la rattrape à nouveau : Canal+ lui propose de rejoindre la série H.

De “Tout le monde en parle” à “H” : la révélation

Lorsque démarre la troisième saison de H, en 2000, la comédienne débarque dans l’équipe en apportant un souffle nouveau. Elle incarne Charlotte Strauss, la fille du professeur Strauss (Jean-Luc Bideau). De retour en France après avoir grandi à New York, Charlotte se voit propulsée “surveillante en chef” par son père, qui continue à la traiter comme une enfant.

Le rôle avait été initialement tenu par Catherine Benguigui, qui décida de quitter la série lorsque la production proposa une alternance de tournage. Linda Hardy la remplace donc dès le deuxième épisode, et rapidement, elle s’impose.
Face à elle, deux personnages masculins s’éprennent de son charme : Jamel (Jamel Debbouze) et Aymé (Éric Judor). Le premier rêve d’une relation sincère, le second ne cherche qu’à flatter son ego. La rivalité entre Clara (Sophie Mounicot) et Charlotte ajoute une touche savoureuse : la “vieille fille moche” contre la belle nouvelle venue.

Au fil des épisodes, Charlotte Strauss devient un personnage attachant et central. Dans Une histoire de ski, l’un des moments les plus marquants de la saison, Charlotte et Jamel vivent enfin leur idylle. L’alchimie entre les deux acteurs, perceptible à l’écran, séduit le public.

Une carrière bien remplie

Après H, Linda Hardy continue son chemin, construisant une carrière solide à la télévision. Elle multiplie les rôles dans des fictions populaires : Section de recherches, Mafiosa, Joséphine, ange gardien, et bien sûr Demain nous appartient, où elle interprète Clémentine Doucet, une professeure d’EPS au tempérament bien trempé.
Chaque soir, près de quatre millions de téléspectateurs suivent les aventures de son personnage sur TF1, preuve de son attachement durable au public.

Aujourd’hui, ce 19 octobre 2025, Linda Hardy fait partie des trois invités de Frédéric Lopez dans son émission Un dimanche à la campagne. L’occasion de revenir, dans la sérénité et le recul, sur un parcours riche en rebondissements — celui d’une femme qui, de Miss France à comédienne accomplie, aura su tracer son propre chemin, sans jamais renoncer à ses convictions.