Héritage Delon : une bataille qui franchit les frontières

Plus d’un an après la disparition d’Alain Delon, l’icône du cinéma français surnommée « le Samouraï », la querelle familiale autour de son héritage ne cesse de s’intensifier. Ce qui aurait pu rester un désaccord privé entre frères et sœur s’est transformé, au fil des mois, en une véritable saga judiciaire. Désormais, la confrontation ne se limite plus aux tribunaux français : elle s’étend désormais jusqu’en Suisse, où une nouvelle procédure vient d’être lancée par Alain Fabien Delon.

Ce dernier, plus jeune fils de l’acteur, estime que les dernières volontés de son père n’ont pas été respectées. Il accuse sa sœur, Anouchka, d’avoir profité de l’état de faiblesse du comédien à des fins personnelles. Une affirmation grave, qu’il fonde sur les conclusions de plusieurs médecins ayant constaté chez Alain Delon une altération de ses facultés de discernement dès 2019, après l’AVC qui avait profondément fragilisé l’acteur.

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Après la France, la Suisse : une nouvelle offensive judiciaire

En septembre 2025, Alain Fabien avait déjà ouvert les hostilités en France en attaquant le dernier testament rédigé par Alain Delon. Mais cette première action n’était manifestement que le début d’une stratégie plus large. Son avocat a désormais saisi la justice suisse, demandant la suspension de l’exécution du document rédigé en 2022, lequel modifie la répartition de certains biens et avantages au sein de la fratrie.

Selon les informations révélées par RTL, ce nouveau recours s’accompagne d’une menace : celle de demander purement et simplement l’exclusion de sa sœur Anouchka de la succession, une sanction ultime qui existe en droit suisse dans certains cas précis, notamment lorsque l’héritier est soupçonné d’avoir influencé ou manipulé le testateur dans un contexte de vulnérabilité.


“Ce n’est pas une question d’argent” : la version d’Alain Fabien

À première vue, on pourrait croire à un conflit classique autour d’un héritage, alimenté par des questions financières et des rivalités anciennes. Pourtant, Alain Fabien s’en défend. Dans un document consulté par RTL et lors de son passage à l’antenne, il insiste :

« Ce n’est pas une question d’argent. C’est avant tout pour faire respecter les dernières volontés de mon père. Je considère qu’elles n’ont pas été respectées, voire bafouées. »

Pour lui, le testament de 2015, signé alors qu’Alain Delon était encore en pleine possession de ses moyens, représente véritablement l’expression de sa pensée. Ce document attribue 50 % de l’héritage à Anouchka et 25 % à chacun de ses deux fils. Une répartition qu’il juge équitable — et surtout, conforme à ce que son père souhaitait selon lui.

Mais le testament de 2022 change la donne : il attribue à Anouchka 51 % des parts de la société familiale, un rôle renforcé dans la gestion de l’héritage immatériel, ainsi qu’un avantage patrimonial jugé disproportionné par son frère. Pour Alain Fabien, il ne fait aucun doute que, à cette date-là, l’acteur n’était plus en état de consentir pleinement à de telles modifications.

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Un épisode troublant : le testament signé alors qu’Alain Delon était hospitalisé

L’un des éléments les plus sensibles de l’affaire concerne les conditions mêmes dans lesquelles le testament de 2022 aurait été signé. Alain Fabien affirme qu’à cette époque, son père était hospitalisé dans une clinique suisse et se trouvait dans un état de grande vulnérabilité.

Selon sa version des faits :

« Ils l’ont sorti de cette clinique, ils l’ont amené chez un notaire, ils lui ont fait signer un testament, puis ils l’ont ramené à la clinique. »

Une scène qu’il décrit comme profondément choquante, voire suspecte. Il s’interroge : comment peut-on déplacer un patient hospitalisé, affaibli, pour lui faire signer des documents aussi importants ? Cette procédure, à ses yeux, n’aurait jamais dû être menée dans ces conditions.

Plus globalement, il estime que certaines personnes — dont il implique sa sœur — auraient profité de la fragilité psychologique et physique d’Alain Delon pour obtenir des avantages substantiels. Si ces soupçons étaient avérés, ils pourraient ouvrir la voie à une exclusion d’héritage en Suisse pour cause d’indignité.


La position d’Anouchka : silence et fermeté

Face à ces accusations, Anouchka Delon, qui gère aujourd’hui la marque Delon et qui avait une relation très étroite avec son père, reste pour l’instant silencieuse publiquement. Elle n’a pas encore officiellement réagi aux nouvelles démarches de son frère.

Mais son entourage assure que les décisions d’Alain Delon avaient été prises en pleine connaissance de cause, et qu’elle n’a en aucun cas cherché à influencer son père. Selon eux, les changements opérés en 2022 reflétaient la volonté du comédien de confier à sa fille la gestion de son image et de son patrimoine immatériel, estimant qu’elle était la plus apte à préserver son héritage artistique.


Vers une solution amiable ?

Malgré l’ampleur du conflit et la gravité de ses accusations, Alain Fabien affirme vouloir, avant tout, éviter l’escalade. Il dit privilégier une sortie « par le haut », passant par la négociation plutôt que par le combat judiciaire à outrance.

Il propose ainsi l’annulation du testament de 2022 et la révocation d’un don accordé à Anouchka — une démarche qui rétablirait la situation telle qu’elle était en 2015, avant tous les bouleversements récents.

Une audience importante est prévue le 9 mars prochain à Paris, et pourrait constituer un tournant majeur dans cette affaire déjà très médiatisée. Les enjeux émotionnels sont considérables, tout comme les enjeux symboliques : au-delà des biens matériels, c’est la mémoire d’un monument du cinéma français qui se trouve au cœur de ce conflit.


Une saga familiale révélatrice

Cette bataille autour de l’héritage Delon révèle à quel point la question de la fin de vie et des dernières volontés peut devenir complexe, surtout lorsqu’elle concerne des personnalités publiques. Entre enjeux financiers, divergences familiales et interrogations sur la capacité de discernement d’une personne âgée, la situation met en lumière les zones grises du droit des successions, en France comme en Suisse.

Elle rappelle également que même les familles les plus célèbres ne sont pas à l’abri des tensions, des blessures et des incompréhensions. Et qu’au-delà des paillettes et du mythe, la famille Delon doit aujourd’hui affronter une épreuve profondément humaine et douloureuse.

L’histoire est loin d’être terminée. Les semaines à venir, en France comme en Suisse, diront si cette fratrie parviendra à surmonter ses divisions — ou si, au contraire, l’ombre du Samouraï continuera longtemps encore de planer sur ses héritiers.