Votre dernier souhait

Katharina n’était qu’à quelques heures de son exécution. Son dernier souhait n’était ni le traditionnel repas du bourreau ni un appel téléphonique à sa famille. Elle souhaitait simplement revoir son chien, Bruno, une dernière fois.

Katharina était restée sept ans dans sa cellule, le temps et les remords creusant de profonds sillons sur son visage. Pour elle, Bruno n’était pas qu’un animal de compagnie ; il avait été le seul à l’avoir soutenue durant les années précédant son arrestation et sa condamnation. Dans ces derniers instants, elle n’avait pas cherché pardon auprès d’inconnus, mais seulement à regarder dans les yeux ceux qui ne l’avaient jamais condamnée.

Le directeur et les fonctionnaires débattirent. Un chien dans un établissement de haute sécurité le jour d’une exécution ? C’était considéré comme un risque absolu pour la sécurité. Mais la conduite irréprochable de Katharina et les notes émouvantes dans son dossier concernant le berger allemand confisqué, nommé Bruno, firent pencher la balance. Finalement, le directeur acquiesça : Sous surveillance stricte, uniquement dans la cour, pendant dix minutes.

La réunification et l’instinct traître

La cour de la prison se figea lorsque la porte s’ouvrit en grinçant. Katharina se tenait là, les poignets liés, les yeux fixés sur l’entrée. Puis elle le vit : Bruno. Il entra au trot, la queue se mettant à remuer, lentement d’abord, puis de plus en plus vite. Malgré son âge et la légère raideur de ses pattes, elle reconnut le chien qu’elle avait élevé chiot.

Après un signe de tête du directeur de la prison, la laisse se desserra et Bruno chargea. Katharina tomba à genoux au moment même où le chien la heurta et appuya sa tête contre son épaule. L’espace d’un instant, la prison disparut ; il ne restait plus qu’une femme et son chien, unis par la joie et le chagrin. Katharina respira l’odeur du vieux cuir, de la terre et de la maison, tandis que les souvenirs de longues promenades et de nuits paisibles lui revinrent.

Mais Bruno se figea. Son corps se raidit, sa queue cessa de remuer en plein vol, et un grognement profond et guttural s’échappa de sa poitrine. Son regard ne se portait plus sur Katharina, mais sur l’agent Müller, qui se tenait à trois mètres de là.

Le commencement de la vérité

Müller, grand et raide, s’efforçait d’éviter tout contact visuel, la mâchoire crispée. Katharina savait que Bruno ne grognait jamais sans raison. La curiosité la saisit : quelque chose chez cet homme irritait son chien. L’instinct pouvait avoir de multiples conséquences dans un tel endroit.

L’agent Schmidt, que Katharina avait toujours traité avec respect, s’approcha. « Votre chien a un bon odorat », dit-elle doucement. Elle fronça les sourcils en réalisant que Müller était de service la nuit de l’arrestation de Katharina, mais qu’il n’avait jamais signalé sa présence. Lorsque Müller apparut plus tard à l’autre bout de la cour, le grognement incessant de Bruno résonna. L’air était chargé ; ce n’était pas seulement un adieu, mais le début de quelque chose de nouveau.

Le sursis à exécution

Plus tard dans l’après-midi, le directeur de la prison fit conduire Katharina dans une petite salle d’interrogatoire. Bruno fut autorisé à rester et garda la porte. Müller se tenait en face d’eux, raide et le regard froid.

Le directeur de la prison interpella Müller : « Pourquoi n’avez-vous pas révélé votre présence la nuit de l’arrestation de Katharina ? » Müller prétendit qu’il ne faisait que passer. Mais Schmidt s’avança et révéla qu’un témoin venait de se présenter. Ce dernier affirma avoir vu un homme correspondant à la description de Müller quitter le domicile de Katharina avant l’arrivée de la police.

Le visage du directeur de la prison s’assombrit. L’exécution fut immédiatement suspendue et le dossier rouvert. Katharina sentit l’espoir lui revenir. Müller la fusilla du regard avec colère, mais cela n’avait plus d’importance. La vérité avait trouvé une faille par laquelle se glisser, et tout avait commencé avec un chien qui refusait d’oublier.

Liberté

L’enquête progressa rapidement. Les empreintes digitales relevées sur la scène de crime, réexaminées, n’appartenaient pas à Katharina, mais à Müller. Il s’avéra que Müller était présent sur les lieux du crime, avait dissimulé des preuves et avait commis le crime. Il fut arrêté. Le parquet abandonna les poursuites contre Katharina.

Les portes de la prison, qui marquaient autrefois la fin de la vie de Katharina, s’ouvrirent alors pour la libérer. Juste derrière la clôture, Bruno attendait, la queue remuante, les yeux brillants. Katharina tomba à genoux, enfouit son visage dans sa fourrure et murmura : « On a réussi, mon garçon. »

Elle s’avança – sans menottes, sans gardes, sans murs, juste à ciel ouvert. Elle n’était plus la femme définie par une sentence. Elle était la femme en laquelle son chien avait toujours cru, et grâce à cette loyauté, elle avait une seconde chance dans la vie.

L’histoire nous rappelle que parfois la vérité ne vient pas d’un témoin, mais d’un chien qui se souvient.