« J’ARRÊTE DE ME TORTURER » : MICHÈLE BERNIER DÉNONCE LA GROSSOPHOBIE ET LES PORTES DU CINÉMA FERMÉES À CAUSE DE SON POIDS

« J’ARRÊTE DE ME TORTURER » : MICHÈLE BERNIER DÉNONCE LA GROSSOPHOBIE ET LES PORTES DU CINÉMA FERMÉES À CAUSE DE SON POIDS

Dans un paysage médiatique obsédé par la minceur et l’éternelle jeunesse, la voix de Michèle Bernier résonne comme un acte de résistance. À 68 ans, la comédienne adorée du public, figure emblématique de la série La Stagiaire et pilier des Grosses Têtes, vient de livrer un témoignage d’une franchise désarmante sur les pressions incessantes qu’elle a subies au cours de sa carrière en raison de son apparence physique. Invitée au micro de l’émission On refait la télé sur RTL, Michèle Bernier a mis les pieds dans le plat, confirmant sans détour que son poids lui a, plus d’une fois, fermé les portes du cinéma, dénonçant un système cruel et superficiel.

Loin d’être une simple confidence, sa déclaration est un véritable manifeste pour l’acceptation de soi et un réquisitoire contre la grossophobie latente qui gangrène encore le show-business. Elle annonce avec une sérénité nouvelle avoir fait « la paix » avec ses rondeurs, mettant un terme à des années d’autocritique et de tentatives de se conformer à des standards irréalistes.

L’Hypocrisie de la Grossophobie dans le Show-Business

Le Jugement : « C’est de ta faute, tu n’as qu’à pas manger ! »

Michèle Bernier, qui a toujours affiché ses formes avec panache, a souvent été la cible de jugements et de critiques. Mais c’est la dimension insidieuse et moralisatrice de la grossophobie qu’elle a choisi de dénoncer avec une ironie mordante. La comédienne a mis en lumière la culpabilisation permanente qui accompagne les personnes en surpoids, qu’elle résume par la sentence populaire : « Il y a un côté ‘c’est de ta faute, tu n’as qu’à pas manger ! À partir du moment où tu manges, tu exagères’ ».

Ce type de critique, qui déplace le débat de l’apparence à une prétendue faute de gourmandise ou de manque de volonté, est particulièrement violent dans un milieu où l’image est reine. Bernier insiste sur le droit fondamental à exister, quelles que soient ses mensurations : « On a le droit de vivre, c’est ça qui est fou ! » Ce simple cri du cœur révèle l’ampleur de la pression sociale qui pèse sur les femmes, et plus encore sur celles qui osent s’éloigner de la norme de la minceur. Elle rappelle avec justesse que le seul moment où le poids doit devenir une préoccupation est si et seulement si, cela engendre des problèmes de santé.

Le Cinéma, un « Métier de Désir » Discriminatoire

Le Physique, un Filtre Sexué et Hétérocentré

L’aspect le plus dévastateur du témoignage de l’actrice concerne l’impact direct de son physique sur sa carrière, notamment sur grand écran. Pour Michèle Bernier, il n’y a pas l’ombre d’un doute : « J’imagine que cela m’a déjà fermé des portes au cinéma. C’est sûr et certain. » Ce constat, posé avec une clarté désabusée, ébranle l’idée d’un cinéma qui ne jugerait que le talent.

Elle décortique le mécanisme de cette discrimination, pointant du doigt la nature profondément sexuée et hétérocentrée des choix de casting : « Je pense que le problème est qu’une femme doit plaire physiquement au producteur et au réalisateur. » Selon elle, tant que le pouvoir de décision restera majoritairement entre les mains d’« hommes hétéros », le choix d’une actrice tiendra à une logique de pure attirance, réduite à une binaire humiliante : « Celle-là m’excite, celle-là ne m’excite pas. »

Cette analyse est une critique cinglante du système, qui ne valorise pas l’art pour l’art, mais instrumentalise l’image féminine au service d’un « métier de désir » souvent réducteur. Bernier avait déjà exprimé cette réalité avec une autodérision amère dans le magazine Nous Deux : « Le cinéma aime les filles glamour qui peuvent vanter des produits de beauté : moi, ce serait plutôt les produits vaisselle ». Derrière l’humour, la douleur de l’exclusion est palpable.

La Nouvelle Approche : La Paix avec Soi-même

« J’arrête de me torturer » : Un Acte de Libération

Si Michèle Bernier revient sur ces difficultés, ce n’est pas pour s’apitoyer, mais pour partager la sagesse acquise au fil du temps. Son message le plus puissant est celui de la libération intérieure. Après avoir passé une grande partie de sa vie à vouloir être différente – « J’ai passé ma vie à vouloir être mince. Eh bien, je ne le serai jamais » – elle a finalement décidé de déposer les armes.

« Moi, je vis très bien avec ça, j’ai fait la paix avec ça. J’arrête de me torturer avec ça maintenant. » Cette affirmation marque la fin d’un long combat contre soi-même. Elle a fait le choix délibéré de se détacher des pressions extérieures, réalisant qu’il y a « des choses plus graves dans la vie ». L’unique concession qu’elle s’autorise est une limite de poids à ne pas dépasser, non pas pour l’esthétique, mais uniquement pour son propre bien-être physique : « car je sais qu’au-delà, je ne me sens pas bien ».

Cette approche pragmatique et bienveillante envers son propre corps est une source d’inspiration pour des millions de personnes. En refusant de se laisser définir ou diminuer par un chiffre sur la balance ou par les normes obsolètes d’un milieu professionnel, Michèle Bernier donne une leçon de résilience et d’acceptation de soi qui transcende largement le cadre du cinéma. Son témoignage, d’une force et d’une honnêteté rares, est une invitation à tourner la page des complexes et à célébrer la vie, le talent, et le droit de vivre pleinement, peu importe son apparence. C’est la victoire d’une femme qui a décidé que son corps n’était plus un champ de bataille, mais simplement sa maison.