Quand le paradis semble proche et que l’espoir semble fragile.2587

Du cœur d’une mère

Brielle dort avec son père.
Et moi, assis là, les mains tremblantes, je me demande combien de temps mon cœur pourra encore supporter.

Je ne suis pas médecin.
Juste une mère, qui essaie de sauver son enfant avec amour, foi et le peu de force qui me reste.

Il y a deux semaines, sa douleur est revenue – vive, incessante, cruelle.
Nous lui avons administré les médicaments, murmuré des prières à travers ses larmes, l’avons tenue dans nos bras tandis qu’elle pleurait.
Il n’y a rien de plus dévastateur que d’entendre son bébé dire :


« Maman, ça fait mal. »

Pendant quatre jours, j’ai tout arrêté.
Plus de lessive, plus de vaisselle, plus d’appels. Le monde extérieur aurait pu s’effondrer, et je ne l’aurais pas remarqué.
Ma vie entière était devenue le son de sa respiration – superficielle, irrégulière – et le rythme de ses petits doigts enroulés autour des miens.

Je la regardais dormir, comptant les secondes entre chaque soupir.
J’ai mémorisé ses cils, les douces boucles de sa tempe, la façon dont elle murmurait dans ses rêves.
C’est étrange comme, quand on vit au milieu de la tempête, les plus petits instants deviennent une bouée de sauvetage.

Parfois, elle se réveille en souriant.
Et l’espace d’un instant, tout redevient normal.
Elle réclame des crêpes, veut regarder son dessin animé préféré, rit aux paroles de son père.
Et j’ai presque l’impression que nous sommes une famille ordinaire, vivant une journée ordinaire.

Mais la douleur revient, soudaine et intense, comme un éclair à travers son petit corps.
Et nous voilà de retour au combat.
Retour aux moniteurs, aux seringues, aux prières murmurées.


De retour à la tenir malgré les larmes, comptant les minutes jusqu’à ce que les médicaments fassent effet.

On me dit que je suis forte.
Mais en vérité, je ne le suis pas.
Je me laisse aller chaque jour, parfois discrètement, parfois si fort que Dieu lui-même doit se boucher les oreilles.


Je pleure sous la douche pour qu’elle ne le voie pas. Je hurle dans les serviettes.
Puis je m’essuie le visage, je souris et je redeviens « maman ».

Parce qu’elle a besoin que je sois courageux.


Même quand je ne le suis pas.


Il y a une photo sur ma table de nuit : Brielle à trois ans, couverte de farine, m’aidant à faire des biscuits.
Ses joues étaient rondes, son rire était sauvage et libre.


C’était avant le diagnostic. Avant que les chambres d’hôpital ne deviennent notre seconde maison. Avant que j’apprenne à lire ses analyses sanguines comme une seconde langue.

Parfois, je regarde cette photo et je lui murmure :


« Tu me manques. »
Mais je réalise alors qu’elle est toujours là – différente, certes, mais toujours la même âme.
Toujours mon bébé.

Les gens nous demandent comment nous faisons, comment nous survivons aux nuits interminables, à l’incertitude, à la peur.


Je n’ai pas de réponse.
On fait, c’est tout.
On aime, on espère, on s’effondre, on prie — et pourtant, on continue à respirer.

J’ai appris que l’amour n’est pas seulement doux.


C’est féroce.
C’est le genre d’amour qui veille toute la nuit, comptant chaque respiration.


Le genre qui apprend des termes médicaux que vous n’avez jamais voulu connaître.
Le genre qui résiste aux appels de l’assurance, à l’épuisement et trouve encore la force de chanter des berceuses à 3 heures du matin.


Hier, pendant que je changeais son pansement, elle a levé les yeux vers moi et m’a demandé :
« Maman, pourquoi Dieu m’a-t-il rendue malade ? »

Je me suis figé.
Personne ne vous prépare à cette question.

J’aurais voulu dire : « Il ne l’a pas fait, ma puce. Il ne voulait pas ça pour toi. »
Mais la vérité m’a coincée. Parce que je n’ai pas toutes les réponses.


Alors j’ai fait ce que font les mères quand les mots manquent : je l’ai serrée fort dans mes bras.


Et j’ai murmuré : « Dieu t’a créé fort. Et courageux. Et m’a aimé au-delà de toute mesure. »

Elle hocha la tête, comme si elle le savait déjà.
Puis elle sourit, et pendant un instant, je vis une lumière – pas celle du soleil, mais quelque chose de plus profond, d’éternel.

C’est peut-être ça la foi.
Non pas l’absence de peur, mais la conviction profonde que l’amour vous portera au bout du tunnel.


Ce soir, la maison est silencieuse.
Les écrans bourdonnent doucement, la veilleuse éclaire le mur.


Les bras de son père l’entourent, son cœur battant au rythme du sien.
Et moi, assise là, à écrire, je ne sais plus quoi faire de cette douleur intérieure.

Je pense aux familles qui parcourent ce même chemin — des parents assis près de lits d’hôpital, tenant de petites mains, priant pour un lendemain de plus.


Nous sommes étrangers, mais nous partageons le même battement de cœur.
Nous connaissons le langage de la peur, le silence de l’attente, le poids de l’espoir.

J’ai appris que l’espoir ne ressemble pas toujours à la guérison.
Parfois, il est plus petit, plus silencieux.
C’est son rire après des jours de souffrance.


C’est le moment où elle murmure « Maman, je t’aime » avant de s’endormir.
C’est la façon dont son père l’embrasse sur le front chaque soir, comme pour lui rappeler – et se rappeler à lui-même – que l’amour triomphe toujours.

Et d’une certaine manière, c’est le cas.
Car quoi qu’il arrive, l’amour a déjà gagné.
C’est écrit dans chaque nuit blanche, chaque prière murmurée, chaque cicatrice sur nos cœurs qui dit : « Nous avons continué. »


Si vous voyiez Brielle aujourd’hui, vous verriez une battante.
Elle est fragile, certes, mais son esprit est ardent.


Quand elle rit, la salle entière se transforme.
Elle fait sourire les infirmières, attendrir les médecins.
Elle nous rappelle à tous l’essentiel : non pas les chiffres, ni les dossiers, mais l’amour qui comble les vides.

Parfois, je la regarde et je me demande :
« Comment ai-je eu autant de chance ? »
D’être sa mère. D’être choisie pour cette bataille impossible et magnifique.

Et d’autres fois, je tombe à genoux et je murmure :
« S’il te plaît, Dieu, ne la prends pas encore. »

Les deux prières viennent du même cœur, un cœur tendu entre le ciel et la terre.


Alors ce soir, je vais rester ici encore un peu.
Je regarderai sa poitrine se soulever et s’abaisser.
Je mémoriserai la paix sur son visage et m’y accrocherai pour quand la douleur reviendra.

Et si demain m’apporte une nouvelle série de mauvaises nouvelles, je l’affronterai comme je le fais toujours :
un souffle, une prière, un battement de cœur à la fois.

Parce que c’est ce que font les mères.
On continue d’aimer, même quand ça fait mal.


Nous continuons à croire, même lorsque nous nous brisons.
Et pourtant, à travers les fissures, la lumière parvient toujours à se frayer un chemin.

Du cœur d’une mère,
fatiguée, tremblante, mais toujours pleine d’amour.
Toujours de l’amour.